Citations montagnes

 

Abîme

Il faut prendre des leçons d’abîme. (Jules Verne, Voyage au centre de la terre)

Alpinisme

L’alpinisme est l’art de parcourir les montagnes en affrontant les plus grands dangers avec la plus grande prudence. On appelle ici art l’accomplissement d’un savoir dans une action. (René Daumal, Le Mont Analogue)

Plus haut je monterai, plus je plongerai mon regard dans les profondeurs de mon être. (Reinhold Messner, Everest sans oxygène)

Seul l’alpinisme me permet de surmonter mon isolement du monde, de me sentir en union avec le cosmos. Et seulement dans les cas, dans les moments où, à la suite d’une tension extrême, j’atteins un état dans lequel mon moi se dissout. (Reinhold Messner, Les horizons vaincus)

L’alpinisme, à mes yeux, est presque aussi sérieux que la philosophie ou la théologie. C'est une éducation morale autant que musculaire. C'est une espèce de religion. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Toutes les grandes dates de l’alpinisme ont été et seront la rencontre d’une montagne et d’un homme. (Georges Sonnier, La montagne et l’homme)

Bien plus qu’une discipline du corps, l’alpinisme est un luxe de l’esprit et une ressource de l’âme. Car, la montagne, à qui sait la voir, offre le visage d’une sagesse à conquérir et à posséder. Ce que l’alpiniste trouve là-haut, c'est une vision du monde. Comment s’étonner, après cela, que l’amour de la montagne soit capable d’infléchir une existence, voire de l’orienter toute entière en fonction d’elle – de ce qu’elle nous enseigne ? Car sa pratique est une leçon perpétuelle. Une leçon de vie. (Georges Sonnier, La montagne et l’homme)

L’alpinisme est un sport stupide qui consiste à grimper les rochers avec les mains, les pieds et les dents. (Lionel Terray, Les conquérants de l’inutile)

Le véritable alpinisme est intérieur. A mesure que l’on monte, l’âme aussi s’élève, se détachant de tout ce qui bas, de tout ce qui est laid. (Léon Zwingelstein)

Alpiniste

L’alpiniste est celui qui sait conjuguer la compétence technique, la conscience du risque et un amour de la montagne fait de familiarité et de respect. (Paul Keller)

Altitude

L’altitude, c'est l’indicible, l’impalpable, le léger voile de l’illusion jeté sur le ciel. (Pierre Gilloire, Montagne vagabonde)

Comment ne pas se détacher des joies bruyantes, des faux plaisirs et de la politique, après s’être enivré de liberté sur des savanes de neige, à 3.000 mètres au-dessus des ennuis, des tristesses et des chaînes que nous impose la tyrannie du monde ? Vus de si haut et de si loin, les dynasties, les Républiques et les Empires perdent de leur charme et de leur intérêt, on n’y pense plus, on trouve même que les rochers sont plus sages que les hommes, car aucun d’eux ne cherche à prendre la place de son voisin. Quelle bonne leçon, ils nous donnent là ! (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

On est meilleur à 3.000 mètres qu’au niveau de la mer ; aucune souillure, aucun mauvais instinct ne monte si près de Dieu. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Ascension

Comme un violon chante d’autant mieux que l’artiste sait mieux le faire chanter, une ascension ne vaut que par celui qui l’exécute et qui est capable de la réussir. (M.A. Azuma, La conquête du Fitz Roy)

Tiens l’œil sur la voie des sommets, mais n’oublie pas de regarder tes pieds. Le dernier pas dépend du premier. Ne te crois pas arrivé parce que tu vois la cime. Veille à tes pieds, assume ton pas prochain, mais que cela ne te distraie pas du but le plus haut. Le premier pas dépend du dernier. (René Daumal, Le Mont Analogue)

Celui qui, dans une ascension matérielle, vit peu ou prou une élévation intérieure, y découvre le symbole d’une réalisation spirituelle, et saisit l’authentique message de ces immensités, où jouent les forces libres et pures du ciel et de la terre – celui-là se percevra lui-même comme « vie » bien plus que comme « corps » et transformera en une tension vitale créatrice son ascension. (Julius Evola, Méditations du haut des cimes)

Plusieurs chemins s’offrent à l’ascension, mais du sommet s’offre à nous la même vue de la lune. (Ikkyû, Maître zen)

D’où vient cette joie profonde qu’on éprouve à gravir les hauts sommets ? D’abord, c'est une grande volupté physique de respirer un air frais et vif qui n’est point vicié par les impures émanations des plaines. L’on se sent comme renouvelé en goûtant cette atmosphère de vie ; à mesure qu’on s’élève, l’air devient plus léger ; on aspire à plus longs traits pour s’emplir les poumons ; la poitrine se gonfle, les muscles se tendent, la gaieté entre dans l’âme. Le piéton qui gravit une montagne est devenu maître de soi-même et responsable de sa propre vie. (Elisée Reclus, La Terre)

Bâton

Pour le coureur de montagne, le bâton est sa troisième jambe, c'est avec lui qu'il se hasarde sans crainte dans les passages les plus dangereux, qu'il descend avec rapidité sur les neiges et sur les pentes herbues les plus inclinées. Qu'un accident l'en prive, il perd de son courage, car il se sent privé d'une partie de ses moyens, aussi met-il ses soins à ce qu'il soit léger et solide, parce qu'il sait que, plus d'une fois, sa vie dépendra de sa bonté. (Vincent de Chausenque, Les Pyrénées ou voyages pédestres dans ces régions)

Bergers

Les bergers sont des hommes magnifiques, de vrais stentors, hurlant quand ils répondent, comme tous les hommes accoutumés à la tempête et à l’espace. Ils sont causeurs, honnêtes, obligeants. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Blancheur

La blancheur contracte l’espace et le froid ralentit le temps. (Jean Echenoz, Je m’en vais)

Pour ceux qui n’ont pas vu les hautes montagnes couvertes de neige sous un ciel bleu et par une matinée glaciale, la blancheur est un mot vide sens : ils n’ont jamais rien vu de blanc. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Carrefour

Pour le voyageur, le carrefour n’est pas seulement la croisée des chemins menant vers des directions différentes, il implique parfois un choix d’existence, il relève d’une volonté de chance qui se heurte ou non à l’adversité. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Chemin

Va toujours par le chemin le plus court, et le plus court est toujours celui de la nature. (Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même)

Celui qui gravit les montagnes acquiert quelques solides convictions qui peuvent l’aider à s’orienter dans l’existence. Ainsi, il sait avec certitude que le chemin le plus court n’est pas le meilleur. Celui-ci – outre qu’il répond à un souci qui n’est pas celui du marcheur : arriver le plus tôt possible – est en montagne le trajet de l’épuisement et de l’échec. La ligne droite doit laisser place aux lacets : marcher en zigzag, en ne s’élevant qu’un petit peu à chaque fois, permet de gagner les sommets. Savoir s’éloigner pour pouvoir se rapprocher, telle est la belle maxime qui s’écrit sous les pas du marcheur. Il ne griffe pas la pente d’un trait rageur qui part du pied du mont et va jusqu’à son sommet. Il corsète le mont d’une série de lacets qui l’étreignent délicatement et amoureusement.  (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

Le chemin relie la file infinie des générations. Un marcheur emprunte toujours les pas de ses innombrables prédécesseurs. Le chemin est une forme de communication non seulement dans l’espace mais aussi dans le temps. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Tout chemin aboutit à un autre chemin, dans un mouvement sans fin qui relie toutes les routes du monde, interrompues seulement par les mers ou les montagnes. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Contrairement à la route, le chemin est un appel à la lenteur et non à la vitesse, à la rêverie et non à la vigilance, à la flânerie et non à l’utilité d’un parcours à accomplir, il procure la confiance et non à la menace. Il ouvre la voie à la découverte, à la surprise, à l’exploration. Il invite à la liberté. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Nous avons toujours le sentiment qu’au bout du chemin quelque chose nous attend, qui n’était destiné qu’à nous. Une révélation est non loin de là, à quelques heures de marche, au-delà des collines ou de la forêt. Et le flou du paysage alimente encore la conviction qu’un secret est dans l’imminence de venir à jour. Nous empruntons certaines routes dans le désir qu’elles creusent dans la mémoire une incise lumineuse. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Tout chemin est d’abord enfoui en soi avant de se décliner sous les pas, il mène à soi avant de mener à une destination particulière. Et parfois il ouvre la porte étroite qui aboutit à la transformation heureuse de soi. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Chaque homme doit inventer son propre chemin. (Jean-Paul Sartre)

N’ayant jamais eu de demeure au bout de la route, il n’y a aucun chemin sur lequel je pourrais m’égarer. (Ikkyû)

Le plus court chemin qui mène à soi fait le tour de la terre. (Sun Wu Kungh)

Cimes

Une fois épris des cimes sauvages et tourmentées qui bondissent vers le ciel, et de leurs rochers noirs entourés de blancheurs éternelles ou de lacs solitaires, on les aime toute sa vie. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Civilisation

La civilisation est la patrie par excellence, pour ne pas dire la mère, de la folie, fléau extrêmement rare, presque inconnu chez les sauvages. Elle est l’ennemi de la nature. Elles ne se réconcilieront pas. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Compagnons (de voyage)

Une des plus fines expériences de la vie est de cheminer avec quelqu'un dans la nature, parlant de tout et de rien. La conversation retient les promeneurs auprès d’eux-mêmes, et parfois, quelque chose du paysage impose le silence. (Christian Bobin, Autoportrait au radiateur)

Il est plus facile de trouver un compagnon de voyage que de s'en débarrasser. (Art Buchwald)

Je désirerais choisir comme compagnons de voyage, un Français pour m’amuser, un Anglais pour m’instruire, un Indien pour m’apprendre à ne jamais perdre ma dignité. Si avec cela, un homme capable, noir ou blanc, mais habile en l’art culinaire, se chargerait de combattre pour mon estomac, je ferais bien facilement le tour du monde. (Henry Russell, 16.000 lieues à travers l’Asie et l’Océanie)

Contemplatif

L’homme d’action est toujours sans conscience ; il n’y a de conscience que chez le contemplatif. (Goethe, Pensées)

Le contemplatif est celui pour qui l’envers vaut plus que l’endroit. (Pierre Reverdy, Le Livre de mon bord)

Contemplation

L’activité de contemplation, la plus haute des occupations de l’être humain selon la philosophie antique, est aujourd'hui discréditée et oubliée. Plus personne ne songe à entrer en contemplation parce que ce est qui réputé valoir, c'est la prise, la possession, l’assimilation. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

L’aptitude à conserver une juste distance, par laquelle la chose vue n’est pas accaparée mais seulement admirée, devient une aptitude rare. La marche enseigne cet art grâce auquel le monde suscite le recueillement et le respect. L’aspiration à la beauté et à la sérénité rencontre une satisfaction profonde dans cette relation à la nature. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

Contempler

Tant de mains pour refaire le monde, et si peu de regards pour le contempler. (Julien Gracq)

Courses faciles

Pourquoi dédaignerions-nous les courses faciles, à mi-hauteur, dans les sentiers et les pâturages ? Si nous n’y trouvons pas l’attrait du terrible et de l’inconnu, ni les splendeurs des régions glacées, combien d’autres beautés en revanche ne se montrent que là, beautés aimables et adoucies, larges prairies, troupeaux échelonnés sur les pentes, bruits de clochettes mêlés au murmure des ruisseaux, nappes de mousse humectées par des sources invisibles ! On chemine dans l’herbe, sur des tapis de petites fleurs naïves et charmantes, sous les grandes ombres fraîches qui tombent des montagnes, et au milieu d’une lueur bleue, nacrée, pleine à la fois de soleil et d’ombre, qui transfigure les sommets et les enveloppe d’une majesté sereine. (Franz Schrader, Courses et ascensions dans les Pyrénées)

Courses solitaires

Pour ne plus éprouver le sentiment d’être séparé du monde, il faut que j’aille à la limite de mes capacités physiques, et cette limite, je ne peux l’atteindre qu’en ascension solitaire, dans une paroi à très haute altitude, en brûlant et en épuisant les forces ultimes de mon corps. (Reinhold Messner, Les horizons vaincus)

La force grandit lentement dans le cœur du grimpeur solitaire. Elle doit mûrir jusqu’à le faire éclater, croître comme l’amour. Quand cette force devenue passion manque, toute action devient calcul et la résolution n’est plus qu’une affaire de raison. Que saurait opposer la raison aux risques mortels des avalanches, des crevasses, de l’épuisement. Peu, trop peu. (Reinhold Messner, Les horizons vaincus)

Ceux qui désirent réellement goûter aux joies et aux plaisirs de la montagne doivent savoir se débrouiller dans les neiges d’en haut en ne se confiant qu’en leurs talents et en leurs connaissances propres. (Albert Frederick Mummery, Mes escalades dans les Alpes et le Caucase)

On est plus brave dans les montagnes quand on est seul. C'est un bonheur d’être deux, c'est une leçon d’être seul. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Quelle leçon que d’aller seul ! Que de choses on apprend forcément, quand l’ascension devient un duel entre la montagne et l’homme, et quand il faut veiller des heures entières, sur chacun de ses pas, avec la certitude que la moindre chute peut être mortelle ! Après avoir passé par là, on s’imagine valoir deux hommes. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

N’est-il pas clair qu’il y a des qualités morales qu’un montagnard n’acquiert jamais sous la tutelle d’un guide ou d’un ami ? Pour cela, il faut s’être trouvé seul en lutte avec toutes les fureurs de la nature, entouré de brouillard et d’abîmes, et livré entièrement à soi-même, dans les neiges éternelles, balayées par le vent et l’orage. Se fier aux autres et dépendre d’eux émousse nécessairement l’audace et détruit toute confiance en soi-même, pour l’excellente raison qu’elle n’est plus nécessaire. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Je ne vais pas jusqu’à conclure qu’il faille absolument être seul pour s’émouvoir vivement devant les grands spectacles de la nature. Mais… peu s’en faut. Est-ce un état morbide de l’âme, que ce besoin de recueillement et d’isolement, quand on éprouve une émotion sincère, profonde et douée ? Non, mille fois non. L’amour un peu misanthropique de la nature n’est pas une maladie, ce n’est qu’un paradoxe et un mystère. Notre âme est pleine d’énigmes. Les vrais malades, ce sont ceux qui prétendent, et qui croient réellement, que plus on est nombreux dans une course de montagnes, plus elle est agréable et utile. Quelle énorme hérésie ! C'est comme si on disait que le meilleur moyen de lire un livre, de le mettre à profit, et d’en jouir, c'est d’en faire la lecture en commun, cinq ou six à la fois, se tenant par la main, et à haute voix. Ne serait-ce pas outrager son auteur ? (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

La montagne réclame de la personnalité. Partir seul, c'est s’affirmer et s’assumer à la fois. C'est là que l’on a aussi d’immenses plaisirs. La montagne pour soi tout seul, l’itinéraire choisi en fonction de la personnalité et des désirs du moment. (Michel Sébastien, Sommets pyrénéens)

Pour être appréciée à sa juste valeur une randonnée pédestre devrait être entreprise seul. La marche à plusieurs, ou même à deux, n’a plus de randonnée que le nom ; c’est quelque chose d’autre, qui ressemble à un pique-nique. Une randonnée pédestre devrait être entreprise seul, parce que la liberté en est l’essence. (Robert Louis Stevenson)

J’ai toujours préféré aller seul, je n’ai jamais eu envie de me joindre à une expédition organisée. (Wilfred Thesiger, Dans les montagnes d’Asie)

Crépuscule

On dirait que la Nature, avant de sombrer dans la nuit, rassemble toutes ses richesses et, s’arrêtant dans son évolution, les déploie à l’envi. Pour qui donc se fait-elle si belle ? Serait-ce pour ceux qui savent la regarder et s’émouvoir avec elle ? (George Cadier, Au pays des isards)

Quel peintre pourra jamais mettre sur une toile, traduire par la couleur, les lueurs mourantes, la tristesse infinie, et la gloire dont se couvre la nature à la fin d’un beau jour, sur ces sommets vertigineux où l’homme est entouré d’une telle immensité, se trouve si haut, et voit si loin, qu’il lui semble être sorti du monde, et dominer un hémisphère ? Quel écrivain saurait décrire ce qui se passe alors dans l’âme qui sait encore sentir ? Elle se recueille comme la nature, elle s’illumine et se passionne : les nuages dorés qui s’assoupissent à l’horizon la font rêver aux séraphins prosternés devant Dieu, et dans chaque brise qui passe, elle croit entendre un chant du ciel égaré sur la terre. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

C'est surtout le soir qu’on se passionne pour les montagnes ; car jamais dans la plaine on ne voit d’aussi fastueux et d’aussi solennel que la rougeur mélancolique des neiges et des glaciers au coucher du soleil. C'est un déluge de sang et d’or, c'est d’une grandeur tragique. (Henry Russell, Pyrénaïca)

Cul de plomb

Rester assis le moins possible ; n’accorder foi à aucune pensée qui ne soit née en plein air et en prenant librement du mouvement, où les muscles soient à la fête. Tous les préjugés viennent du cul de plomb ; c'est le véritable péché contre l’esprit. (Nietzsche, Crépuscule des idoles)

Dangers

Ne diminuons jamais les dangers des montagnes, amis, mais ne les exagérons pas non plus : in medio veritas. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Descente

On parle toujours de montée, et jamais de descente, on a tort. Pour ma part, j’adore les descentes. L’esprit satisfait d’avoir accompli la course, le muscle détendu, profitez des descentes, elles sont parfois superbes. (Michel Sébastien, Sommets pyrénéens)

Écologie

Nous avons reçu le monde comme un héritage qu’il n’est permis à aucun de nous de détériorer, mais que chaque génération au contraire est obligée de laisser meilleur à la postérité. (Joseph Joubert, Carnets)

La terre a une peau et cette peau a des maladies. L’une d’elles s’appelle « homme ». (Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)

Il nous faudra bien répondre à notre véritable vocation qui n’est pas de produire et de consommer jusqu’à la fin de nos vies mais d’aimer, d’admirer et de prendre soin de la vie sous toutes ses formes. (Pierre Rabhi)

Effort physique

La dépense physique est jubilation car elle n’est pas contrainte mais signe d’une belle journée de découvertes, de souvenirs éblouis, on s’abandonne avec délice à une fatigue qui rend grâce au corps et au paysage. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Le marcheur est son propre maître d’œuvre, il recourt seulement à son corps et à ses ressources physiques pour progresser, sans autre énergie que son désir et sa volonté de mener un parcours à son terme. La satisfaction est d’autant plus grande de ne devoir qu’à soi. Au terme de l’effort, il y a toujours le repos, la fringale des repas ou la saveur des boissons, le bonheur de la halte du soir, la douche ou le bain qui prépare à la renaissance. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Élévation

Une demi-heure passée à réfléchir sur une sommité, au pied d’un escarpement ou sur le bord d’un cratère, agrandit, élève et instruit l’esprit bien plus que la lecture de la plupart des livres. (Cordier d’Abbeville)

Il faut être redescendu des très hautes altitudes ou de courses très longues et engagées, à la limite de nos possibilités, pour connaître cet état particulier de détachement du monde… Mais cette expérience peut être vécue à tous les niveaux et des altitudes plus modestes. Dans ces situations (ou à leur retour) l’homme éprouve un besoin d’explication qu’il ne trouve pas dans un système de pensée purement rationnel. Toutes les interprétations sont alors possibles. Et chacun ressentira le besoin de donner du « sens » à cette expérience limite pour construire son « ailleurs » : philosophie, esthétique, métaphysique ou religion. Quelle que soit la réponse construite, elle reste de l’ordre de l’individuel et peut difficilement se partager. Je suis pourtant convaincu que l’expérience d’une immersion totale en montagne déclenche inévitablement une sorte d’élévation de la pensée, pour ne pas dire une « exaltation » de l’âme. (Luc Jourjon, Montagne & alpinisme)

Plus nous nous élevons haut, plus nous semblons petits à ceux qui ne savent pas voler. (Nietzsche, Aurore)

Tout homme qui s’élève, s’isole. Et je comparerais volontiers la hiérarchie des esprits à une pyramide. (Antoine de Rivarol, Pensées diverses)

Que l’homme est méprisable, s’il ne s’élève pas au-dessus des affaires humaines. (Sénèque, Lettres à Lucilius)

Emotion

Marcher ne suffit pas pour s’immerger dans un lieu, il faut être dans l’émotion du moment, la lucidité de sa présence au monde, et non dans la routine de mettre un pied devant m’autre. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Errer

On se dégoûte de cette vie molle des hôtels quand on a savouré tant de fois et si longtemps le plaisir d’errer sans entraves et sans lois sur les terres qui n’ont point encore été arrachées à la nature, derniers asiles de liberté dans le monde. (Henry Russell, 16.000 lieues à travers l’Asie et l’Océanie)

Excursion

Pourquoi le sentiment s’est-il ancré en moi de bonne heure que, si le voyage seul – le voyage sans idée de retour – ouvre pour nous les portes et peut vraiment changer notre vie, un sortilège plus caché, qui s’apparente au maniement de la baguette de sourcier, se lie à la promenade entre toutes préférées, à l’excursion sans aventure et sans imprévu qui nous ramène en quelques heures à notre point d’attache, à la clôture de la maison familière. (Julien Gracq, Les eaux étroites)

Flâneur

La balade, c'est la marche qui institue le hasard en maître. Le flâneur se laisse porter et déambule sans intention précise, simplement pour passer le temps agréablement. Sans hâte, disponible, abandonné aux impressions qui l’affectent, le promeneur goûte le spectacle d’un moment. Il est l’exact contraire de l’homme pressé, affairé, qui passe sans rien voir, déjà tendu vers un prochain rendez-vous. Le flâneur n’a pas de rendez-vous, il n’est l’obligé de personne. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

Où sont-ils les flâneurs d’antan ? Où sont-ils, ces héros fainéants des chansons populaires, ces vagabonds qui traînent d’un moulin à l’autre et dorment à la belle étoile ? Ont-ils disparu avec les chemins champêtres, avec les prairies et les clairières, avec la nature ? Un proverbe tchèque définit leur douce oisiveté par une métaphore : ils contemplent les fenêtres du bon Dieu. Celui qui contemple les fenêtres du bon Dieu ne s’ennuie pas, il est heureux. Dans notre monde, l’oisiveté s’est transformée en désœuvrement, ce qui est tout autre chose : le désœuvré est frustré, s’ennuie, est à la recherche constante du mouvement qui lui manque. (Milan Kundera, La lenteur)

Forêt

Les forêts précèdent les peuples. Les déserts les suivent. (René de Chateaubriand)

La forêt est un univers mêlé où l’ordre se conjugue au désordre, l’ombre à la lumière, le vivant à l’inanimé, la confiance à la peur, les sens y sont en partie brouillés car le regard ne va guère loin, l’ouïe est aux aguets, il ‘y a plus de frontières nettes entre les mondes. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Foule

Les caravanes alpestres peuvent être utiles à des novices, je n’en doute pas ; mais ceux qui ont la passion de la nature, et une longue expérience des montagnes, n’aimeront jamais la foule ; bien plus, ils la fuiront, car elle dépoétise et profane tout. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Amoureux de la neige, de la lumière, de l’Infini et de l’azur, je me désole souvent à la pensée des foules fébriles et dévoyées qui s’agitent et s’ennuient sous les nuages, dans le fond des vallées, où, pour être heureux, on dépend des ballons, des théâtres, des casinos, des ventriloques et des feux d’artifices. (Henry Russell, Pyrénaïca)

Granit

Comment dire l’attrait du rugueux, de l’inébranlable, de l’immuable ? Nous aimons cette roche primitive qui nous inspire une confiance jamais déçue. Soit que nous bondissions, soit que nous nous guindions, elle demeure la même. Rude est son écorce : à la longue les mains s’y déchirent. Mais qui s’appuie sur elle ne saurait trouver plus fidèle amie. Souvent aussi, dans le monde moral, la rudesse découvre la plus rare des vertus. (George Cadier, Au pays des isards)

Grimper

Il nous faut encore grimper un bon moment, lentement, mais toujours plus haut, afin de gagner un point de vue bien dégagé sur notre vieille civilisation. (Friedrich Nietzsche, Correspondance)

Hautes Montagnes

Quiconque n’a point pratiqué les montagnes de premier ordre, ne pourra jamais s’expliquer l’attrait qui y ramène sans cesse celui qui les connaît. (Maurice Gourdon, Soixante ans aux Pyrénées)

Les hautes montagnes sont le refuge de la sagesse, et même de la sainteté. C'est là qu’on voit ce qu’il y a de plus beau, de plus céleste et de plus infini sur terre. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Les hautes montagnes sont le dernier refuge et la consolation des âmes lassés des orages de la vie. Elles sont un vrai trait d’union entre la terre et le ciel, dont elles reflètent les gloires et la sérénité. L’homme y change de nature, et la vie qu’il y mène n’a plus rien de commun avec celle d’ici-bas. Là, il vit, pour ainsi dire, dans un autre monde, aussi bien au moral qu’au physique : il est transfiguré, parle, regarde, respire et pense différemment, la neige, le silence, l’air bleu des montagnes le rendent naïf et pur comme un enfant. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Imprévu

Quant à moi, j’aime cette croyance, que l’imprévu est un bonheur et une bénédiction, une chose éminemment providentielle, qui embellit et poétise la vie, comme un peu d’ombre et de mystère embellissent la nature. Ne sondons ni l’avenir ni le temps, puisqu’il faut les subir. Croyons ou espérons toujours qu’ils seront beaux. Les illusions sont la moitié de notre bonheur. Que deviendrons-nous donc sans elles ? (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Laideur

En vérité, il n’y a de laid dans la nature que ce que l’homme a profané, défiguré et défloré. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Comme la terre sera laide si c'était l’homme qui l’avait faite ! Où l’a-t-il embellie ? (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Langue française

La découverte pittoresque de la grande montagne est purement de langue française – et un élément d’éternel honneur de la langue française. Dans l’action, dans la conquête de la montagne, les hommes de langue française ont eu des éclipses, des époques de renoncement, quitte à se reprendre brillamment ensuite ; dans la littérature de montagne le français est resté de premier ordre : la langue de Rousseau, de Bourrit, de Saussure et de Ramond, de Toppfer et de Tonnellé, de Russell et de Javelle. (Henri Béraldi, Cent ans aux Pyrénées)

Lenteur

Il y a une puissance propre à la lenteur, et qui se traduit fort exactement dans l’expression "poison lent". On signifie par là que l’effet tarde à se manifester, qu’il est progressif, mais aussi qu’il est implacable et pénètre sûrement chaque vaisseau sanguin. Toute lenteur, et en particulier celle de la marche, présente cette caractéristique de faire son effet progressivement et de produire au final une impression d’une rare puissance parce qu’elle parcourt la totalité de l’être. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur).

Lieu

La sérénité d’un lieu, sa beauté est d’abord un fait de regard, un privilège donné à certains plus qu’à d’autres car ils sont animés d’une volonté de chance. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certains lieux imposent la nécessité de leur présence, et leur magnétisme amène à sentir l’impossibilité d’être ailleurs. On éprouve en les traversant la conviction qu’ils nous attendaient et n’avaient jamais de nous hanter. Ce n’est pas une découverte mais un retour. Le temps se dérobe, toute l’histoire personnelle converge vers ce moment. Le temps s’arrête, la lumière n’est plus celle qui baigne la vie ordinaire, un autre monde se presse, au sein duquel nous sommes sur le point de rentrer. Une autre dimension du réel s’ouvre, marquée par le silence, la sérénité, la beauté. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certains lieux possèdent peut-être une conscience et ils cherchent à dire au passant leur plaisir de voir arpenter leur domaine. Sans doute faut-il parfois assister les dieux, les aider à resplendir lors de notre passage. Il fallait être là à ce moment précis pour que le paysage atteigne sa perfection, avec le sentiment qu’il attendait notre présence et n’est là que pour nous seul à la manière d’un don qui n’attend rien en retour sinon ce sentiment de paix et d’alliance. Il y parfois une telle insistance dans certains paysages qu’on y soupçonne la volonté du génie du lieu de partager son domaine avec les voyageurs qui s’y aventurent. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certains lieux sont plus que d’autres propices à la révélation, leur éblouissement est une suspension du temps, un arrachement soudain à soi. Bien sûr la vie reprend son cours, mais un instant elle est suspendue hors de toute familiarité. Le marcheur est entré dans un domaine de transcendance dont il va devoir se déprendre, non sans peine, et parfois non sans douleur. En s’arrachant au sortilège, il sait être infidèle à lui-même mais sans avoir le choix. Nul ne saurait s’établir dans la proximité du chant des sirènes, même Ulysse doit s’éloigner. Et déjà le fait d’avoir entrouvert l’espace est un privilège rare. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Lieux hantés

S’il y a des lieux d’une alliance absolue avec le monde et qui donnent le sentiment d’être enfin arrivé chez soi, d’autres, à l’inverse, font craindre de se dissoudre et il faut les fuir avant qu’il ne soit trop tard. Ces lieux sont rares, mais ils sont des abîmes. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Lune

La lune est plus aimable que le soleil, son regard est plus tendre. Moins éblouissante et moins altière que lui, elle est plus attachante et plus sociable. Elle se laisse admirer, elle nous éclaire sans nous brûler, elle n’allume que le cœur et l’imagination. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Marche

Marcher, c'est prendre le temps de vivre, de regarder, d’ouvrir ses sens à la diversité et de sentir les minutes et les heures glisser sur la peau. Quand le corps accepte sa peine, respiration et mouvement s’allient, libérant ainsi la pensée qui toute entière s’enveloppe du présent. (Julie Baudin et David Ducoin, Zanskar intime)

Si tu n’arrives pas à penser, marche ; si tu penses trop, marche ; si tu penses mal, marche encore. (Jean Giono)

La marche est une invitation à mourir debout. (Frédéric Gros, Marcher, une philosophie)

Éloignez-vous à un jet de pierre sur la droite ou sur la gauche de cette route bien entretenue sur laquelle nous marchons, et aussitôt l'univers prend un air farouche, étrange. (Rudyard Kipling)

Je ne souhaite rien d'autre, par ce livre, que redonner à son lecteur le goût des herbes et des chemins, le besoin de musarder dans l'imprévu, de retrouver ses racines dans le grand message des horizons. (Jacques Lacarrière, préface à Chemin faisant)

La marche est une sorte de musique et de gymnastique tout à la fois. Elle cultive le corps et l’âme dans le même élan. L’effort qu’elle impose au corps est gradué et continu, sans accès qui jette le corps au bord de l’effondrement. Le rythme qu’elle installe est égal et fortifie les muscles au fil du temps. Ce même rythme n’étouffe pas l’âme et son discours, c'est-à-dire la pensée. Chacun le sait : la marche favorise la réflexion, plus que ça, elle la stimule. Le pas ouvre l’espace de la méditation aussi bien que celui de la pérégrination. Rendue à la beauté, au silence et à la lenteur, l’âme reprend souffle et contact avec les éléments simples et nécessaires à son expression. Une bonne marche en montagne, lente et longue, permet souvent de réintroduire, dans l’âme et dans le corps, l’harmonie détruite par le bruit, la laideur et l’affolement de la vie citadine. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

La marche dénude, dépouille, elle invite à penser le monde dans le plein vent des choses et rappelle à l’homme l’humilité et la beauté de sa condition. Le marcheur est aujourd'hui le pèlerin d’une spiritualité personnelle, son cheminement procure le recueillement, l’humilité, la patience, il est une forme déambulatoire de la prière, offert sans restriction au genius loci, à l’immensité du monde autour de soi. (David Le Breton, Eloge de la marche)

La marche mène à des moments où le monde s’ouvre sans réticence et se révèle sous un jour émerveillé, seuil parfois d’une métamorphose personnelle. En le découvrant pas à pas et à hauteur d’homme le marcheur se met en situation de se découvrir soi dans la brûlure des évènements dont il ne saurait prévoir toutes les péripéties car, de même que l’existence, une marche est faite de plus d’improbable que de prévisible. (David Le Breton, Eloge de la marche)

Même si elle sollicite une expérience multiple selon l’état d’esprit, la présence ou non des autres, les saisons ou la nature du terrain, la marche est une ouverture au monde qui invite à l’humilité et à la saisie avide de l’instant. Elle restaure la dimension physique de la relation au milieu environnant et rappelle l’individu au sentiment de son existence. Elle procure une distance propice avec les choses, une disponibilité aux circonstances, plonge dans une forme active de méditation, sollicite une pleine sensorialité. Marcher est un longtemps voyage dans la disponibilité à ce qui vient. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche induit peu à peu une sorte de transe, une douce fatigue imprègne les muscles et libère l’esprit qui n’est plus assujetti à la rumination des soucis. Après quelques heures d’efforts les mouvements glissent comme la durée, comme l’eau s’écoule dans la rivière, dans une sorte d’évidence. La conscience s’est élargie, elle développe une lucidité tranquille sur la progression, sur les incidents possibles du parcours. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche est inutile comme toutes les activités essentielles. Superflue et gratuite, elle ne mène à rien sinon à soi-même après d’innombrables détours. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche déjoue les impératifs de vitesse, de rendement, d’efficacité, elle n’en même rien à faire. Elle ne consiste pas à, gagner du temps mais à le perdre avec élégance. Il ne s’agit plus d’être pris par le temps mais de prendre son temps. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche est une école de patience, en aucun cas de résignation, au contraire, mais elle apprend à ne pas se précipiter et à ‘ajuster aux circonstances, qu’elles soient heureuses ou porteuses de complications. Le marcheur est un artiste des occasions. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche dénude, dépouille, elle invite à penser le monde dans le plein vent des choses et rappelle à l’homme l’humilité et la beauté de sa condition. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Marcher est toujours une longue prière aux absents, une conversation ininterrompue avec les fantômes, ceux qui ne sont plus là mais demeurent les compagnons ou les compagnes d’une vie, les hommes et les femme croisés au fil de l’existence et qui ont disparu mais dont la mémoire persiste en soi. Les conversations intérieures trouvent là un terrain d’élection dans la sérénité et la disponibilité. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certes, une marche est peu de chose au regard d’une existence et souvent elle ne laisse qu’une trace fugitive dans la mémoire. Là est sans doute sa force de nourrir le goût de vivre dans une simplicité essentielle. D’où le désir de repartir encore, d’arpenter de nouveaux territoires ou de retourner sur les traces de parcours anciens pour en retrouver les souvenirs et les sensations. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La marche ramène le regard à une juste dimension, apprend à gouverner le temps. Le marcheur est un roi. Un roi qui souffre d’être à contre-courant mais qui a choisi, pour aller mieux, les grands espaces plutôt que le divan des rebouteux. (Bernard Ollivier)

J’aime à marcher à mon aise, et m’arrêter quand il me plaît. La vie ambulante est celle qu’il me faut. Faire route à pied par un beau temps dans un beau pays sans être pressé, et avoir pour terme de ma course un objet agréable ; voilà de toutes les manières de vivre celle qui est le plus de mon goût. (Jean-Jacques Rousseau, Confessions)

Ôter ses chaussures
Et marcher pieds nus
Parmi les monts et les brumes.
(Kenneth White, Les cygnes sauvages)

Marche nocturne

On dirait que la Nature, avant de sombrer dans la nuit, rassemble toutes ses richesses et, s’arrêtant dans son évolution, les déploie à l’envi. Pour qui donc se fait-elle si belle ? Serait-ce pour ceux qui savent la regarder et s’émouvoir avec elle ? (George Cadier, Au pays des isards)

Marcher de nuit est une formidable remontée dans le temps. Cet univers d’étoiles dans le ciel, la luminosité trouble de la lune n’ont guère changé depuis le commencement du monde. Et pour le marcheur qui ne s’effraie pas de l’obscurité, c'est aussi un retour aux nuits de l’enfance quand l’électricité ne colonisait pas encore les villes et les campagnes, quand les voitures étaient rares et ne trouaient pas la terre de leurs phares. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Une marche au cœur de la nuit, sous la lumière de la lune dans la forêt ou à la campagne, laisse une trace vive de mémoire avec le sentiment d’avoir pour quelques heures basculé dans l’Ailleurs. Elle procure ce sentiment de n’être qu’une infime créature sous l’infini du ciel et des étoiles, on se sent porté par cette puissance qui amène à se sentir porté par cette puissance qui amène à se sentir encore plus vivant, non plus tributaire d’une vie personnelle mais immergé dans un océan de formes dont on est qu’une respiration dérisoire et émue. Soustrait au monde des perceptions ordinaires, aux familiarités du jour et livré à un au-delà de soi, le marcheur est confronté à une religiosité intime, difficile à partager. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Celui qui n'a jamais passé la nuit sur le haut des montagnes n'a pas la moindre idée de ce qu'est le silence. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Marcheur

Un marcheur est un homme ou une femme qui se sent passionnément vivant et n’oublie jamais que la condition humaine est d’abord une condition corporelle, et que la jouissance du monde est celle de la chair et d’une possibilité de se mouvoir, de s’extraire de ses routines. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Un marcheur est un homme ou une femme qui affronte les ennuis avec égalité d’âme. Il sait que le chemin ne se plie pas à sa volonté parce qu’il l’emprunte, et que l’éloignement du confort de la vie quotidienne confronte à de menus tracas qui font justement le sel de la marche et ses souvenirs les plus incrustés. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Méditer

Méditer est un loisir suprême, dont le secret s’est perdu. (Cioran, De l’inconvénient d’être né)

Dans l’immobilité et le silence de la méditation, nous entrevoyons, puis nous réintégrons cette nature profonde et secrète que nous avons perdue de vue depuis si longtemps, au milieu de l’effervescence et de la distraction de notre esprit. (Sogyal Rimpoché, Méditations)

Les méditations prennent en montagne je ne sais quel caractère grand et sublime. (Rousseau, La nouvelle Héloïse)

Ne pas avoir le temps de méditer, c’est n’avoir pas le temps de regarder son chemin, tout occupé à sa marche. (A. Serillanges)

Montagnard

Marcher, sentir et écrire, devise du vrai montagnard. (Henri Béraldi, Balaïtous et Pelvoux)

Le montagnard, c'est le poète-athlète. Celui-là sait goûter les scènes pittoresques et pastorales de la vallée, il aime à s'attarder le long des lacs tranquilles et des sentiers des bois ; il jouit longuement des altitudes et ralentit le pas pour voir monter à l'horizon les orages ou la nuit ; il campe sous un rocher au clair de lune. Il sait aussi braver les crevasses et les parois menaçantes et savourer l'intense sensation du danger. Mais ce qui parle à son coeur, c'est moins le sport que la Montagne. (Henri Brulle, Ascensions)

Il y a plus d'une affinité entre les sauvages et les montagnards, pourvu que l'on s'entende sur la valeur et le sens des mots, et qu'on désigne par l'épithète de "montagnards", non pas les citadins efféminés et pommadés qui grimpent par vanité, par "pose", quitte à tomber malades après chaque course, mais ceux qui font des ascensions par goût, par vocation, par enthousiasme, par passion. Il est vrai qu'ils sont rares, et qu'on profane souvent le nom de "montagnard", car sur les 60.000 alpinistes que comptent aujourd'hui les divers clubs alpins, on ne trouverait certainement pas 6.000 vrais montagnards, soit dix pour cent. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Le montagnard est tendre : car la nature, son modèle et sa sœur, l’est toujours : la tendresse est sa note dominante. Mais il est presque aussi sauvage que tendre, et il lui reste toujours quelque chose d’abrupt, d’inaccessible et de rugueux. Son âme s’entoure de précipices, de solitude, et même de neige ; mais alors elle a froid : c'est un avertissement du ciel. Quand on en est arrivé là, on touche à la misanthropie et même à l’égoïsme ; on est en mauvaise voie, on ressemble trop à une montagne et il vaut mieux redescendre dans la plaine. Il ne faut pas se singulariser jusqu’à glacer son cœur. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Le montagnard a des analogies avec le moine, et les païens eux-mêmes, les bonzes et les lamas de l’Inde et du Tibet ont érigé presque tous leurs monastères au sommet des montagnes, où leurs prières et leurs méditations ressemblent à des extases. Jamais je n’ai vu d’hommes plus graves. S’ils ne sont pas des saints, ils en ont l’air. L’adoration semble naturelle sur les sommets mais pour cela il faut qu’ils soient déserts, ou à peu près. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Un montagnard aime toujours la nature tant qu’elle n’a pas été défigurée par l’homme. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Les montagnards sont comme les musiciens, qui ont le don d'enfanter des chefs-d’œuvre avec quinze ou vingt notes déjà utilisées par leurs ancêtres, mais dans un autre esprit, dans un autre ton, et surtout avec d'autres émotions. (Henry Russell, préface à Au pays des isards des frères Cadier)

Montagne

Quand la montagne vous a pris le cœur, tout vient d’elle et tout vous y ramène. (Henri Béraldi, Cent ans aux Pyrénées)

Celui qui n’est pas tenté par les cimes est menacé par les abîmes. (Boileau)

La montagne n’est pas l’infini mais elle le suggère. (Pierre Dalloz, Zénith)

L’ennui se fait musique au bord de la mer, et extase sur le sommet des montagnes. (Cioran, Le crépuscule des pensées)

La montagne est la voie par laquelle l’homme peut s’élever à la divinité, et la divinité se révéler à l’homme. (René Daumal, Le Mont Analogue)

La montagne enseigne le silence. (Julius Evola, Méditations du haut des cimes)

La montagne est esprit en raison de tout ce qu’elle implique comme discipline des nerfs et du corps, comme hardiesse lucide en même temps qu’exacte mesure du danger, esprit de conquête et, en somme, élan vers l’action pure dans une atmosphère de force pure. (Julius Evola, Méditations du haut des cimes)

Au-delà du seuil de ses interdits, la montagne ne concède ses permis de passage qu’aux passionnés et aux proscrits, manifestant ainsi quelque secrète inclination pour les aventuriers. Ils sont tous passés par ses cols enneigés depuis les temps immémoriaux, chasseurs à l’arc du néolithique, cristalliers, contrebandiers, insoumis, soldats perdus, vaudois traqués, colporteurs, hors-la-loi, hommes aux semelles de vent. Passagers d’hier, passagers d’aujourd'hui, randonneurs de haute route, skieurs en peaux de phoque, grimpeurs de l’impossible, homme libres. (Pierre Gilloire, Montagne vagabonde)

Celui qui a grandi dans la montagne, il peut bien pendant des années étudier la philosophie ou l'histoire naturelle et faire table rase des vieilles croyances : quand il sent à nouveau le fœhn ou entend une avalanche dévaler à travers les bois, son cœur tremble dans sa poitrine et il songe à Dieu et à la mort. (Hermann Hesse, Peter Camenzind)

La haute aventure comme celle de la montagne façonne un type d’homme dont on a oublié le culte. (Maurice Herzog, préface à Victoire sur l’Everest de Sir General Hunt)

La montagne est pur esprit. (Henri Michaux, Un Barbare en Asie)

Celui qui gravit les plus hautes montagnes se rit de toutes les tragédies, qu’elles soient réelles ou non. (Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)

Apprendre à détourner les yeux de soi-même pour voir beaucoup de choses, cette dureté est nécessaire à tous ceux qui gravissent des montagnes. (Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)

Philosopher, comme je l’ai toujours enseigné et pratiqué jusqu’ici, c'est vivre volontairement sur la glace et les cimes. (Nietzsche, Ecce Homo)

Presque toujours, les montagnes trompent à première vue : elles se donnent de grands airs, mais ressemblent aux hommes, qui ont tous un point faible, quelque habilement dissimulé qu’il soit. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Je plains ceux que la nature et les montagnes laissent insensibles, il leur manque quelque chose, ce sont des instruments fêlés et des cloches qui sonnent mal. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Les hautes montagnes sont le refuge sacré de la sagesse, et même de la sainteté. C'est là qu’on voit ce qu’il y a de plus beau, de plus céleste et de plus infini sur la terre. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Dans le silence et la sérénité des hautes montagnes, l’histoire humaine a l’air d’un drame de la folie, où la sagesse et la lucidité ne sont que des entractes. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

C’est la sagesse ultime de la montagne que l’homme n’est jamais plus homme que quand il se bat pour ce qui est hors de sa portée. (James Ramsey Ullman, La grande conquête)

Monter

Je monte parce que la randonnée est une leçon continue : leçon sur les choses, leçon sur la vie, qu’il faut savoir apprécier à sa juste et grande valeur. Peu importe le temps pourvu que j’arrive et que j’aie du plaisir. (Michel Sébastien, Sommets pyrénéens)

Je monte parce que j’ai l’errance dans la peau. L’envie de marcher et de voir autre chose. Je monte parce qu’en montagne, je suis bien. Tout cela est très simple et c'est pour cela que c'est très bien. La vérité comme le bonheur se boit aux petites sources. Et chaque randonneur doit trouver sa voie comme on la trouve dans la vie. La vérité en montagne comme ailleurs n’est écrite nulle part ; chacun doit la chercher. (Michel Sébastien, Sommets pyrénéens)

Nature

L’élément naturel est une école de vie où chacun puise la substance qui le nourrit : solitude, silence, liberté, air pur, sagesse, humilité, confrontation, beauté, simplicité, apaisement, etc. Chaque être humain cultive une façon toute personnelle de se frotter à la nature. Certains s’y posent en contemplatifs, chercheurs d’absolu, d’autres l’approchent en douceur, dans la torpeur d’un dimanche ensoleillé. D’autres encore explorent ses derniers recoins sauvages, marquant le sol vierge de leurs empreintes. Quelques-uns enfin, s’y confrontent plus violemment, en se mesurant aux éléments. Pour tous, c'est une quête, un rendez-vous privilégié avec eux-mêmes. (Carine Anselme in Terre Sauvage)

Le spectacle de la nature est toujours beau. (Aristote)

On ne commande à la nature qu’en lui obéissant. (Bacon, Novum Organum)

Pour sauver la nature, il faut tuer l’homme. (Maurice Chappaz)

Nous croyons regarder la nature, et c'est la nature qui nous regarde et nous imprègne. (Claude Charrière, Le maître d’âme)

La grâce est toujours unie à la magnificence dans les scènes de la nature. (Chateaubriand)

Une nature rectiligne et géométrique rendrait l’humanité folle à brève échéance. (Malcolm de Chazal, Sens-plastique)

Si nous prenons la nature pour guide, nous ne nous égarerons jamais. (Cicéron)

En permettant l’homme, la nature a commis beaucoup plus qu’une erreur de calcul : un attentat contre elle-même. (Cioran, De l’inconvénient d’être né)

La nature a ses lois et punit toute infraction. (Alfred Döblin, Berlin Alexanderplatz)

Nous vivons trop dans les livres et pas assez dans la nature. Nous ressemblons à ce niais de Pline le Jeune qui étudiait un orateur grec pendant que sous ses yeux le Vésuve engloutissait cinq villes sous la cendre. (Anatole France, Le Jardin d’Epicure)

Pas un prestidigitateur n’égale la nature : elle opère sous nos yeux, en pleine lumière, et cependant il n’y a pas moyen de pénétrer ses secrets. (Rémy de Gourmont, Pensées inédites)

C’est une triste chose, de songer que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas. (Victor Hugo)

Que dans la nature un artiste agit, dont les œuvres sont assurément visibles pour tous, dans l’atelier pourtant duquel nul ne pénètre, point n’est besoin de le démontrer. Nous le voyons confirmé, où que nous tournions le regard, en chaque aile de moucheron, en chaque brin d’herbe, en chaque flocon de neige. (Ernst Jünger, Le Contemplateur solitaire)

La IIIème guerre mondiale est commencée : c’est celle que l’homme a déclenchée contre la nature. (Otto Koenig, Un Paradis à notre porte)

La nature à l’état sauvage est le meilleur miroir de nos âmes. (Reinhold Messner, Une Vie d’alpiniste)

La nature a des perfections pour montrer qu’elle est l’image de Dieu, et des défauts, pour montrer qu’elle n’en est que l’image. (Blaise Pascal, Pensées)

Il y autre chose dans la nature que ce qu’on y voit : il y a ce qu’on y sent et ce qu’on y devine. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

La nature est autre chose qu’un laboratoire : c'est un spectacle et une école. D’ailleurs, les choses que l’on comprend le moins sont souvent celles qui plaisent le plus. Qu'est-ce que la mélodie, l’harmonie et l’amour ? Qu'est-ce que le Beau ? Et même dans l’ordre purement physique, que sait-on et saura-t-on jamais exactement ce que c'est qu’un fluide ? Qu'est-ce que l’affinité chimique, l’ozone et le sommeil ? Le saura-t-on dans dix mille ans ? Il est probable que non, et nous n’y perdrons rien. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Plus on s’éloigne de la nature et moins on est heureux. Et c'est moins étonnant que jamais, car tout va mal autour de nous. La civilisation, telle qu’elle est aujourd'hui, avec ses haines, ses vilenies, ses appétits féroces, ses maladies nouvelles et ses désenchantements, a de terribles inconvénients. Elle est bien laide et bien malsaine. Elle est en décadence et quand on ne dépend plus d’elle, quand on peut s’en passer, on la regrette si peu, et on dévore avec une telle ivresse l’air de la liberté, comme un lion échappé de sa cage, qu’il est vraiment bien excusable, en ces heures délicieuses, d’envier le sort de l’homme de la nature, et d’embrasser de temps en temps la vie sauvage, ou du moins celle qui lui ressemble le plus, c'est-à-dire celle du montagnard. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Ce qui nous captive le plus dans la nature, ce n’est pas sa beauté, c'est sa virginité, bien plus que ses atours et ses richesses. Pourvu qu’elle n’ait subi aucune profanation, elle devient une idole, quel que soit son costume. Rien ne fascine autant que les plaines mortes et calcinées des grands déserts, et les immensités de neige, sans trace humaine, où s’est accumulé le prodigieux silence des siècles. Tous les explorateurs savent cela. Aucun ne me contredira. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Il faut chercher la source de nos plaisirs dans la nature et celle de nos maux dans la société. (Bernardin de Saint-Pierre)

Il n’y a point de contradictions dans la nature. (Vauvenargues, Réflexions et maximes)

Neige

La neige ne se décrit pas, aussi je la laisse en blanc. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Jamais un pic découronné de neige ne m’a séduit. Il a l’air d’un monarque détrôné, il ne règne plus, il est comme tout le monde et perdu dans la foule. On le salue, mais voilà tout. Il n’a plus de diadème. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Nomade

L’histoire universelle a été faite par des ethnies mobiles ; non par une paysannerie sédentaire, mais contre elle. La liberté de la plaine, la liberté de la mer ont produit les créateurs des peuples et des États et les grands hommes d’action. La paysannerie subit l’histoire, qui passe au-dessus d’elle ; ce sont le cavalier et le navigateur qui la font. (Oswald Spengler, Ecrits historiques et philosophiques)

Nuages

Si je devenais aveugle, ce qui m’ennuierait le plus, c'est de ne plus pouvoir regarder jusqu’à l’idiotie le défilé des nuages. (Cioran, Écartèlement)

En vérité, l’histoire d’un nuage serait intéressante à étudier et à écrire : plus que la vie de bien des hommes. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

On n’admire pas assez les nuages, et c'est peut-être pour cela qu’ils voyagent tant, l’indifférence des hommes les rend volages. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Nuit à la belle étoile (bivouac)

On s’habitue vite à dormir des rochers et dans les Pyrénées, il n’en manque pas. On n’a que l’embarras du choix. Un bon rocher vaut une maison, et on se sent chez soi. Aucun voisin pour faire du bruit, pas d’ouvriers, pas de bébés miaulant ou gémissant, sécurité complète contre l’incendie, pas besoin d’assurance ! (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Il semble que tout conspire contre le bien-être de l’homme couché par terre sur le haut des montagnes. Et malgré cela, il y remonte toujours avec le même plaisir, pour échapper à la douleur ou aux passions. Son âme devient aussi pure que la flamme, elle vient reprendre ici ses couleurs naturelles et, enivrée de poésie et de roman, elle trouve une volupté suprême à se passer des choses humaines. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Quelles sont belles et mémorables, les nuits d’été passées au sommet des montagnes ! Il semble, en vérité, que ce soit le seul plaisir que les années n’émoussent jamais ! (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Celui qui n'a jamais passé la nuit sur le haut des montagnes n'a pas la moindre idée de ce qu'est le silence. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Paradis naturel

Si tu découvre quelque part dans le monde un endroit inconnu de tous et favorisé par la nature, ne le confie à personne : tu ne le reconnaîtrais pas si tu y retournais. (Sagesse orientale)

Partir

Personne n’est plus heureux qu’un homme qui part, si ce n’est un homme qui revient. (Emile Bergerat)

Lâchez tout. Lâcher dada. Lâchez votre femme. Lâchez votre maîtresse. Lâchez vos espérances et vos craintes. Semez vos enfants au coin d’un bois. Lâchez la proie pour l’ombre. Lâchez au besoin une vie aisée, ce qu’on vous donne pour une situation d’avenir. Partez sur les routes. (André Breton, Littérature)

Partir, marcher vers une aventure jamais la même, vers un sommet jamais tout à fait atteint. C'est notre destin à nous, gens de montagne, gens de désir, que de chercher notre vérité dans le vent d’un impossible ailleurs. (Maurice Jeannel, Heures pyrénéennes)

Rien ne sert de courir, il faut partir à point. (Jean de la Fontaine, Le lièvre et la tortue)

Partir ne mène nulle part, j’ai mis longtemps à le comprendre, mais pour cela sans doute était-il nécessaire d’avoir fait tout le chemin. (Antoine Marcel, Traité de la cabane solitaire)

Quelqu’un qui va partir ne le dit pas. Il part et c'est tout. Celui qui parle veut rester. (Alain Monnier, Les Ombres d’Anna)

Pas

Le premier pas que tu fais pour faire le tour du monde ressemble au pas que tu fais pour aller chercher de l’eau au puits. (proverbe chinois)

Tiens l’œil fixé sur la vue du sommet, mais n’oublie pas de regarder à tes pieds. Le dernier pas dépend du premier. Ne te crois pas arrivé parce que tu vois la cime. Veille à tes pieds, assure ton pas prochain, mais que cela ne te distraie pas du but le plus haut. Le premier pas dépend du dernier. (René Daumal, Le Mont Analogue)

Il n’y a que le premier pas qui coûte. (Mme Deffand, Correspondance)

Un pas de plus pour se perdre et l’on se trouve. (Francis Ponge)

Passion de la montagne

Comment se fait-il qu’un être aussi sociable, aussi sensible, aussi fragile que l’homme, se laisse si facilement séduire par le désert, la solitude, et le silence des champs de glace ? Lui que la mélodie fait tressaillir, et que le froid repousse toujours, comment peut-il s’éprendre des précipices de marbre, des aiguilles délabrées de granit, et des neiges éternelles, c'est-à-dire de ce qu’il y a de plus muet, de plus glacial et de plus morne au monde ? D’où nous vient, en un mot, la passion des montagnes ? Ne sont-elles pas les symboles les plus tristes et les plus éloquents de la vieillesse, de la décrépitude et de la mort ? Comment analyser, comment comprendre le charme toujours nouveau que trouve le cœur humain, l’organe par excellence de la tendresse, à s’exiler dans les glaciers, dans l’éternel hiver et la désolation des monts en ruines, au bord des lacs funèbres et des abîmes en deuil semés de larmes de neige, et le plus loin possible des hommes, là où il n’y en a plus trace ? (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Cette passion ne s’acquiert pas ; on a beau faire, on ne peut pas l’inoculer : elle naît toute seule, naturellement, ou on ne l’a jamais : et il est même heureux qu’elle soit exceptionnelle, car tout vrai montagnard a une tendance à fuir les hommes : c'est un demi-sauvage, généralement célibataire. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Paysage

Tout grand paysage est une invitation à le posséder par la marche ; le genre d’enthousiasme qu’il communique est une ivresse du parcours. (Julien Gracq, En lisant en écrivant)

Le paysage est un paquet de saveurs, de couleurs, d’odeurs, où le corps infuse. (Frédéric Gros, Marcher, une philosophie)

Il y a toujours, pour qui a marché longtemps afin de parvenir au détour du chemin à une contemplation recherchée, quand elle vous est donnée, une vibration du paysage. Il se répète dans le corps du marcheur. L'accord des deux présences, comme deux cordes qui consonent, vibrent et se nourrissent chacune de la vibration de l'autre, c'est comme une relance indéfinie. (Frédéric Gros, Marcher, une philosophie)

Tout paysage est menacé car il est pour nos sociétés contemporaines un espace à conquérir et à faire fructifier, il est générosité pure dans un monde où celle-ci devient plutôt anachronique. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certains paysages atteignent à une telle profondeur qu’ils donnent le regret de mourir un jour et d’en être privé à jamais. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Certains paysages portent un don de naissance. En les voyant l’amertume se dissipe, le sentiment d’une alliance avec le monde se renoue. Ils appellent à la mémoire d’un retour à l’existence. Ils seront là désormais comme talisman intérieur pour ne jamais oublier et cesser d’écouter le chant des sirènes de la tristesse. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Pensées

Les pensées nourries par la marche sont plongées dans le cosmos, elles sont "ciel pour moitié", dit Virginia Woolf. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Seules les pensées que l’on a en marchant valent quelque chose. (Nietzsche, Crépuscule des idoles)

Perdre (se)

À une époque où tout est de plus en plus planifié, programmé, organisé, pouvoir se perdre sera bientôt un délice et un luxe exceptionnels. (Gaston Rebuffat, La montagne est mon domaine)

Pics

Il y a dans les grands pics vierges quelque chose d’étrangement solennel, l’on regarde leurs terribles falaises comme le pèlerin du Moyen Âge quelque sainte relique. (Albert Frederick Mummery, Mes escalades dans les Alpes et le Caucase)

Pied(s)

Un compagnon beaucoup plus expérimenté que moi me dit : « Quand les pieds ne veulent plus vous porter, on marche avec sa tête ». Et c’est vrai. Ce n’est peut-être pas dans l’ordre naturel des choses, mais ne vaut-il pas mieux marcher avec la tête que penser avec les pieds, comme il arrive souvent ? (René Daumal, Le Mont Analogue)

Mon pied droit est jaloux de mon pied gauche. Quand l’un avance, l’autre veut le dépasser. Et moi, comme un imbécile, je marche. (Raymond Devos)

Nos premiers maîtres de philosophie sont nos pieds. (Rousseau, Emile ou de l’éducation)

Pierres

Je parle des pierres plus âgées que la vie et qui demeurent après elles sur les planètes froides, quand elle eut la fortune d’y éclore. Je parle des pierres qui n’ont même pas à attendre la mort et qui n’ont rien à faire que laisser glisser sur leur surface le sable, l’averse ou le ressac. (Roger Caillois, Pierres)

Présentes à l’origine, bien avant toute forme d’humanité, produits de la fusion des éléments, les pierres sont toujours là, les mêmes sur lesquelles trébuchait le chasseur du néolithique gênent encore les pas du marcheur d’aujourd'hui. Elles seront encore dans la succession des éternités à venir. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

Pionnier(s)

Il est des hommes dont le destin est d’être des pionniers, d’ouvrir la marche. Ils ont confiance dans la vie, ce sont eux les premiers à la transcender. Quoi qu’il y ait à apprendre, ils l’apprennent avant les autres. Leur existence même est un ferment de force et une source d’élan. (James Salter, L’homme des hautes solitudes)

Premières

L’alpinisme a déchaîné de telles ambitions, une telle frénésie de "premières" que pour les assouvir il a fallu créer des variétés : il y a la première première, puis la première par un autre côté, puis la première de touriste, et la première en col, et la première ascension française d’un pic déjà monté par des grimpeurs d’autres nationalités, et la première par une femme, et la première d’hiver ; même la première ascension de l’année !! Et la première des sous-pointes, et la première du pic sans nom voisin du pic de… (Henri Béraldi, Cent aux Pyrénées)

Pyrénéisme

Les dictionnaires, qui ne s’embarrassent pas toujours de nuances, ont accordé à l’alpinisme le monopole des « ascensions en montagne » quel qu’un soit leur terrain d’élection : Alpes, Himalaya, Andes, Pyrénées ; et relégué au rayon des néologismes, le « pyrénéisme », dont les quartiers de noblesse n’ont rien à envier à ceux de l’alpinisme. Il ne s’agit pas seulement d’une indélicatesse vis-à-vis d’une minorité de montagnards qui, à la même époque que leurs homologues alpins, ont inventé le sport des ascensions en montagne, mais d’une erreur d’appréciation. Car le pyrénéisme n’est pas une simple variété anthropoïde de l’alpinisme, et la correspondance entre alpinisme et pyrénéisme ne peut se réduire à la permutation de deux massifs. Bien sûr, il manque au Nethou plus de 1.400 mètres pour regarder en face le Mont Blanc et les voies d’ascensions –glaciaires ou rocheuses – sont plus nombreuses, plus importantes et plus variées dans l’ensemble de l’arc alpin qu’au long de la chaîne pyrénéenne, pourtant si chaleureuse, où chaque détour de vallée découvre un monde original. (Yves Ballu, Les alpinistes)

Le pyrénéisme est avant tout l’expression d’une affection fidèle, d’une dévotion jalouse, d’une passion souvent exclusive pour l’héritage de Ramond, Packe, Russell, Béraldi, etc., qui, les premiers, ont aimé ce massif inondé de soleil, dont le cœur – Mont-Perdu, Gavarnie, Vignemale – s’oppose au versant espagnol : Telera, Guara, Arazas, Encantats, etc., dans un contraste sans équivalent. (Yves Ballu, Les alpinistes)

Raccourci

Un raccourci est une route sur laquelle on ne rencontre personne à qui demander son chemin. (anonyme)

Routes

Ne crois pas que tu t’es trompé de route, quand tu n’es pas allé assez loin. (Eugène Avstine, dit Claude Aveline, Avec toi-même, etc.)

Les routes d’autrefois conduisaient au moins d’un point à un autre ; dans cet univers-là, il n'y a plus que des rocades en trame serrée, et elles n’ont d’autre intention que de vous emmener vers d’autres rocades. (Philippe Muray, Désaccord parfait)

Il ne dépend que de nous de suivre la route qui monte et d’éviter celle qui descend. (Platon)

Santé

Après un long séjour dans l’air pur des sommets, dans un milieu où tout est virginal et sans souillure, on acquiert une telle force qu’on rajeunit d’un an par jour : à l’automne de la vie, on croit respirer l’air et les arômes de son printemps, et il semble impossible d’être malade ; c’est dans la plaine que tout s’étiole. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Silence

N’ouvre la bouche que si tu es sûr que ce que tu vas dire est plus beau que le silence. (Proverbe arabe)

J’écoute le chant de l’oiseau non pour ses trilles mais pour le silence qui suit. (Sagesse zen)

Les mots que l’on n’a pas prononcés sont les fleurs du silence. (Proverbe japonais)

Celui qui ne donnait pas le silence du désert ne sait pas ce qu’est le silence. (Proverbe touareg)

Silence prime science. (Proverbe touareg)

Le stade ultime de la parole est le silence. (Bernard Amy, Le meilleur grimpeur du monde)

Dans le silence, on n’entend plus que l’essentiel. (Camille Belguise, Echos du silence)

Le silence est l’élément dans lequel se façonnent les grandes choses. (Carlyle, Sartor Resartus)

Le silence est aussi plein de sagesse et d’esprit qu’un bloc de marbre est riche de sculptures. (Aldous Huxley, Contrepoint)

Les âmes se pèsent dans le silence, comme l’or et l’argent se pèsent dans l’eau pure, et les paroles que nous prononçons n’ont de sens que grâce au silence où elles baignent. (Maurice Maeterlinck, Le Trésor des humbles)

Rares sont les mots qui valent mieux que le silence. Comparés à lui, les mots les plus doux, les plus douces musiques sont discordants comme les cris des sourds-muets. (Henry de Montherlant, Carnets)

Si le silence devait s’incarner en une matière, ce serait dans la neige. (Amélie Nothomb, Les Catalinaires)

Le silence est pour les oreilles ce que la nuit est pour les yeux. (Pascal Quignard, La Haine de la musique)

Le silence n’a jamais trahi personne. (Antoine de Rivarol, Pensées)

Le silence de la nuit est le lac le plus profond de la terre. (Dominique Rollin, Le Futur immédiat)

Celui qui n'a jamais passé la nuit sur le haut des montagnes n'a pas la moindre idée de ce qu'est le silence. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Le silence inspire aussi bien les musiciens que les poètes. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Le silence est la politesse de l’âme. (Lydie Salvayre, La Conférence de Cintegabelle)

Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse. (Alfred de Vigny, Les Destinées)

Soleil

Le soleil n'est jamais si beau qu'un jour où l'on se met en route. (Jean Giono)

Solitude

La solitude désole le cœur et contente l’esprit. (Camille Belguise, Echos du silence)

On est plus heureux dans la solitude que dans le monde. Cela ne viendrait-il pas de ce que dans la solitude on pense aux choses, et que dans le monde on est forcé de penser aux hommes ? (Chamfort, Produits de la civilisation perfectionnée)

Les vrais ermites s’enfoncent dans la solitude non pour fuir les dangers de la vie mais au contraire pour les vivre de façon plus authentique. (Claude Jamont, La Vérité commence à deux)

Toute sagesse véritable ne peut se découvrir qu’à l’écart des hommes, dans la grande solitude. (Knud Rasmussen)

Sur les montagnes, la solitude est enivrante. Qui ne l’aime pas ne sent pas la nature. Sans refroidir le cœur, elle détache des tristesses de la terre : elle fait taire les passions, elle force à regarder le ciel. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Même dans la plaine, n’avons-nous pas souvent besoin de solitude, de recueillement et de silence ? À bien plus forte raison dans les montagnes, qui semblent faites pour cela. Ce sont des temples, dont la splendeur et la solennité ont quelque chose d’austère et de sacré. On dirait des lieux saints, dont aucune main profane n’a jamais renversé les autels. On a souvent brisé ceux des chrétiens, mais ni les siècles ni les orages ni les impies n’ont jamais dépouillé de leur gloire les basiliques de neige et de granit élevées par la nature entre les hommes et le ciel. N’y pénétrons qu’avec respect, comme à l’église, et non comme au théâtre. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

On ne peut être vraiment soi qu’aussi longtemps qu’on est seul ; qui donc n’aime pas la solitude n’aime donc pas la liberté, car on n’est libre qu’en étant seul. (Arthur Schopenhauer, Pensées et fragments)

On ne tombe pas toujours dans la solitude, parfois on y monte. (Henri Thomas)

La solitude est à l’esprit ce que la diète est au cœur, mortelle lorsqu’elle trop longue, quoique nécessaire. (Vauvenargues, Réflexions et maximes)

Sommet

Une demi-heure passée à réfléchir sur une sommité, au pied d’un escarpement ou sur le bord d’un cratère, agrandit, élève et instruit l’esprit bien plus que la lecture de la plupart des livres. (Cordier d’Abbeville)

Les sommets des montagnes figurent au nombre des parties inachevées du globe : c'est un peu insulter les dieux que d’y grimper, c'est s’immiscer dans leurs secrets et éprouver leur ascendant sur notre humanité. (David Henry Thoreau, Les forêts du Maine)

Spiritualité

Le caractère spirituel de la montagne se retrouve dans tout effort que l’homme fait par rapport à la quotidienneté de son existence ; la montagne, comme le désert et la mer, sont des lieux où l’on peut se retirer, « faire retraite », pour prendre de la distance, du champ. (Paul Keller, Montagne & alpinisme)

Un morceau de quartz a autant de spiritualité qu’une pensée de Pascal. (Maurice Maeterlinck)

La montagne est un chemin qui fait avancer relativement vite [sur la voie de l’éveil spirituel], car elle exige de se prendre en main, de se confronter aux éléments, à soi-même, aux autres, à la vie et à la mort. (Thierry Renault, Montagne & alpinisme)

Dans son extrême pureté, la montagne est toute entière de l’ordre de l’esprit. Elle est l’image – minérale, mais exacte, sensible au cœur – de l’élan vers l’infini : masse à la fois sublime et tourmentée, dressée, tendue vers le ciel auquel si visiblement elle aspire, mais immobilisée dans ce mouvement même, enchaînée à la terre, incapable de s’en affranchir. Et n'est-ce pas là l’illustration de la condition humaine ? Celle de l’âme, avide d’infini, mais captive du corps, assujettie à toutes ses faiblesses ?… À l’extrême limite de l’univers humain, la montagne aussi oppose la gloire de l’esprit aux tyrannies de la matière. Ainsi nous reconnaissons-nous sans effort en elle. (Georges Sonnier, La montagne et l’homme)

Sublime

Un mot doit être avancé pour rendre compte de l’expérience du marcheur qui évolue dans des paysages grandioses, c'est le mot de sublime. Il peut paraître grandiloquent à première vue et, de plus, ne recouvrir qu’un sens vague et indéfini. En fait, les philosophes lui ont donné un sens rigoureux de sorte qu’on peut en user à bon escient. Dans le langage philosophique, le sublime désigne un sentiment très particulier et rare, celui qui s’empare d’un individu quand il est confronté à quelque chose qui le dépasse, qui le submerge et qui provoque en lui l’admiration et la frayeur. Il fait l’expérience d’une puissance et d’une majesté sans commune mesure avec ce qu’il affronte ordinairement. (Christophe Lamoure, Petite philosophie du marcheur)

Suprasensible

Le retour à la nature, qui est ostensiblement un des articles premiers du manifeste romantique, s’accompagne implicitement d’un retour vers la surnature, vers l’autre réalité, que l’on atteint lorsqu’on va au-delà de la nature, mais toujours par les moyens même de la nature. (Maurice Brion, Peinture romantique)

Terre

La terre est notre mère et notre épouse éternelle, et pareille à toute femme, les dons qu’elle nous fait sont à l’échelle de nos propres richesses. (Ernst Jünger, Le cœur aventureux)

La terre est toujours vivante et sensuelle. Les montagnes, les rochers, les déserts, les étoiles, la nuit, les humains, tout ce qui existe est en suspens de mouvement et en résonance avec le voyageur. (David Le Breton, Eloge des chemins et de la lenteur)

La terre a une peau et cette peau a des maladies. L’une d’elles s’appelle « homme ». (Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)

La terre nous en apprend plus long sur nous que tous les livres. Parce qu’elle nous résiste. (Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes)

Nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants. (Sagesse indienne énoncée par Antoine de Saint Exupéry)

Torrent

Que de fois, perdu dans le brouillard, je me suis tiré d’affaire en prenant pour guide le cours ou la voix d’un torrent. Y a-t-il un guide plus sûr, un ami plus fidèle ? On ne se sent jamais seul, on est rarement triste auprès d’un torrent. Quand il serpente au milieu des prés, il a quelque chose d’heureux, de tranquille et de musical ; et plus haut vers sa source, il est pur et vagabond, comme tout ce qui est jeune. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Vie sauvage

Il faut deux ou trois jours pour accepter la vie sauvage, et en jouir. Mais il en coûte encore bien plus de la quitter. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Plus on s’éloigne de la nature, moins est heureux. Et c'est moins étonnant que jamais, car tout va mal autour de nous. La civilisation telle qu’elle existe aujourd'hui, avec ses haines, ses vilenies, ses appétits féroces, ses maladies nouvelles et ses désenchantements, a de terribles inconvénients : elle est bien laide et bien malsaine, elle est en décadence. Quand on ne déprend plus d’elle, on la regrette si peu, on dévore avec une telle ivresse l’air de la liberté, semblable à un lion échappé de sa cage, qu’il est excusable, en ces heures délicieuses, d’envier le sort de l’homme de la nature, et d’embrasser la vie sauvage, ou du moins celle qui lui ressemble le plus, c'est-à-dire celle du montagnard. Cela n’est pas immoral, et ne laisse ni regrets ni remords. (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Je n’aime ni les cascades artificielles, ni les constructions humaines, ni les illuminations. J’ai peu d’estime pour les orages de l’Opéra, et les plaines sur lesquelles a passé la charrue ne disent rien à mon cœur. J’ai sans doute tort, peut-être mauvais goût. Mais quand je vois le majestueux désordre des pays vierges, les forêts vénérables des montagnes, et leurs neiges aussi vieilles que le monde ; et quand, plus libre et plus heureux qu’un potentat, je m’y endors au clair de lune, près d’un torrent dont la mousse étincelle et palpite dans la nuit, comment ne pas livrer à la nature une partie de mon cœur, qu’elle sait si bien charmer, séduire et passionner ? (Henry Russell, Souvenirs d’un montagnard)

Voyage(s)

Mieux vaut voyager plein d’espoir qu’arriver au but. (Dicton japonais)

Tout voyage est un retour vers l’essentiel. (Maxime tibétaine)

Un des plaisirs du voyage est de plonger là où les autres sont assignées à résidence et d’en ressortir intact, plein de la joie maligne de les abandonner à leur sort. (Jean Baudrillard, Cool memories)

C'est le charme des départs, des ruptures que de nous basculer dans l’inconnu et de creuser au sein de la trame du temps une déchirure bénéfique. (Pascal Bruckner, L’euphorie perpétuelle)

Voyager, c'est se chercher soi-même dans le regard des autres. (Alain Corneau)

Un homme ne va jamais plus loin que lorsqu’il ignore où il va. (Cromwell – également attribué à Antoine Rivarol)

Le plus long des voyages est celui qui ne mène nulle part. (Andrew Crumey, Pfitz)

Nous aurons beau courir le monde à la recherche de la beauté, si nous ne l’emportons pas avec nous, nous ne la trouverons nulle part. (Ralph Emerson)

On ne voyage pas tant pour voyager que pour avoir voyagé. (Alphonse Karr)

Les voyages prouvent moins de curiosité pour les choses que l’on va voir que d’ennui de celles que l’on quitte. (Alphonse Karr)

Il voyage plus vite celui qui voyage seul. (Rudyard Kipling, Les Vainqueurs)

Tout voyage est une initiation et toute initiation gagne à être intégrer dans la lenteur. (Christine Laskowski)

Il n'y a que les voyages qui puissent nous apprendre à nous soustraire au joug des opinions toutes faites, lourd héritage des traditions et des préjugés du passé. (Gustave Le Bon, La Civilisation des Arabes)

Je réponds ordinairement à ceux qui me demandent raison de mes voyages : que je sais bien ce que je fuis, mais non ce que je cherche. (Montaigne, Essais)

On ne saurait aller chercher trop loin le plaisir de rentrer chez soi. (Paul Morand)

Je suis l’homme qui voyage, qui gravit les montagnes ; je n’aime pas les plaines, je ne puis demeurer longtemps assis ; et quel que soit mon destin futur, quoi que je puisse vivre, il me faudra cheminer et ascensionner ; car c'est toujours de soi-même qu’on fait l’expérience. (Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra)

Le charme des voyages, c’est d’effleurer d’innombrables et riches décors, de penser que chacun pourrait être nôtre – et passer outre, en grand seigneur. (César Pavese, Le Métier de vivre)

Fais de ton voyage, non l’abandon de tes principes, mais leur affirmation, non une occasion de dépravation, mais la grande épreuve de ta sincérité, de la pureté de ton cœur. Car seul l’homme qui conserve son intégrité, fidèle à lui-même et à ses convictions face aux séductions de tous ordres, sait que ces convictions ont un fondement véridique et durable dans son âme. Pour lui, le voyage n’est pas une déchéance, mais un sacrement. (David Payne, Confessions d’un taoïste à Wall Street)

Une des dispositions constantes de l'homme est de souhaiter être ailleurs que là où il est. (Jacques Réda)

Le monde n’est qu’un livre et ceux qui ne voyagent pas n’en lisent qu’une page. (Saint-Augustin)

J'ai parfois l'impression de vagabonder autour du monde dans le seul but d'accumuler le matériau de futures nostalgies. (Vikram Seth)

Le voyage est comme le mariage. L’erreur première est de croire qu’on peut le gouverner. (John Steinbeck)

En vérité, je ne voyage pas pour atteindre un endroit précis, mais pour marcher, pour le simple plaisir de voyager. (Stevenson Robert Louis)

Au fond, je me demande si les vrais voyages, les voyages dignes de ce nom, ne sont pas tous, dans une certaine mesure, des voyages dans le temps. La voilà, la vraie frontière ! Voyage à l’intérieur de soi-même, vers son passé et ses origines ou vers son avenir et son accomplissement. C'est le voyage des mystiques, des spéléologues de l’inconscient, des sages et des fous. (Frédéric Vitoux, préface à La voie cruelle Deux femmes, une Ford vers l’Afghanistan 1939 d’Ella Maillart)

Pour connaître le vrai bonheur, il faut voyager dans un pays lointain, et même hors de soi-même. (cité par Kenneth White in Les cygnes sauvages)

Rien ne développe l’intelligence comme les voyages. (Émile Zola)

Voyageur(s)

Les plus grandes séductions peut-être que l’histoire des passions pourrait raconter, ont été accomplies par des voyageurs qui n’ont fait que passer et dont cela seul fut la puissance. (Barbey d’Aurevilly, Une Histoire sans nom)

On a souvent plus de profit à lire les voyageurs qui écrivent que les écrivains qui voyagent. (Nicolas Bouvier, préface à Oasis interdites d’Ella Maillart)

Pareil aux choses cachées qui sont derrière lui, le voyageur est étranger à ce qui est humain : une distance infinie, une étrangeté infinie l’en tiennent éloigné et même lorsqu’il cherche à attirer les hommes dans son cercle magique, quand il leur promet de l’or et quête leur adhésion, la force avec laquelle il agit est celle de l’éloignement infini et de l’autorité que confère l’éloignement des humains. Ainsi la promesse qu’il fournit est celle de l’infini. L’étrangeté et la coupure de toutes attaches marquent tout ce qui est en lui, lui-même est une promesse vide, et son vide est celui en lequel se transmue l’infini dès qu’il paraît sous une forme terrestre. (Hermann Broch, Le Tentateur)

C’est le voyageur solitaire qui va le plus loin. (Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit)

Il y a deux sortes de voyageurs, les touristes et les autres. Les autres, les vrais voyageurs. Les écrivains savent voyager, le plus souvent. Et ce qu’ils rapportent de leurs voyages est encore plus merveilleux que ce qu’ils ont vu. (Claude Michel Cluny, Magazine Littéraire)

Conduis-toi sur terre comme un voyageur et un étranger que les affaires du monde ne regardent aucunement. (Geert Groote, L’Imitation de Jésus Christ)

Un voyageur est quelqu'un qui trace une route qui, de toute évidence, n’aurait pas existé sans son passage. (Frantz Kafka, Correspondance)

Un voyageur est quelqu'un qui emprunte une route dont il imagine qu’elle l’attendait là depuis toujours. (Frantz Kafka, Correspondance)

Oublié dans son pays, inconnu ailleurs… tel est le destin du voyageur. (Prévert & P. Laroche, Les Visiteurs du soir)

Prends garde, ô voyageur, la route aussi marche. (Rainer Maria Rilke)

L’homme est un voyageur qui finit avec sa route. (Antoine de Rivarol, Pensées)

Le voyageur a de vagues projets, le touriste a des certitudes. (Paul Théroux)