Ascension de la Font Blanca par Sorteny (2.903 m)

Accès routier  : À La Massana (5 kilomètres en amont d’Andorre la Vieille), prendre la direction d’Ordino par la N 3. Traverser El Serrat puis, un kilomètre plus loin, quitter la direction d’Arcalis pour emprunter à droite une petite route qui mène au bâtiment d’accueil du Parc Naturel de Sorteny où on trouve un bulletin météo. Départ à 1.780 m.

Dénivelée  : 1.150 m.

Horaire : 6 à 7 h A & R.

Difficulté : Ascension sans réelle difficulté de la Font Blanca (ou pic du Port de Siguer). Montée soutenue jusqu'au portella de Rialb, puis sente en crête jusqu'au sommet. Se méfier du vent qui souffle parfois à plus de 100 km/h en altitude.

Cartographie : Carte Rando Editions Pyrénées N°7 au 1 : 5 0.000e (Haute-Ariège). Carte Rando Editions N°21 au 1 : 50.000e (Andorra-Cadi). Carte Editions Alpina au 1 : 40.000e (Andorra).

Bibliographie : Henry Russell : Souvenirs d’un montagnard (Éditions Monhélios, 2009). Miguel Angulo : Pyrénées 1.000 ascensions tome IV De l’Andorre au Cap de Creus (Éditions Elkra, 2003). Ritter Jean : Le pyrénéisme aux Pyrénées Centrales Maurice Gourdon 1847-1941 (Louveciennes, 2008). George Véron : Randonnées dans les Pyrénées orientales (Rando Éditions, 1999).

A l'accueil du Parc Naturel de Sorteny, une pancarte explicite parfaitement l’itinéraire de la randonnée. Balisé en jaune jusqu’au portella de Rialb (ou Rialp), il commence par s'enfoncer en sous-bois et, passe auprès de la Font (source) Freda.

A la pleta de la Rabassa, on laisse à droite un orhi en ruine pour poursuivre plein Nord.

Bien tracé, le sentier longe la rive gauche du riu de Rialb, traverse la rivière sur une passerelle proximité du refuge éponyme (1.500 m), .

Au Pas del Monjo, un panneau (1.700 m) indique la direction du portella. .

Le chemin tourne le dos au port de Siguer, s’oriente à l’Ouest, dépasse la cabane dels Planells de Rialb sise à la base du pic du même nom (2.587 m).

Puissamment campée sur son socle rocheux, la Font Blanca semble encore lointaine : plus de 1.000 m de dénivelée nous en séparent. Une cascade d’une écumante blancheur jaillit de la source à laquelle elle doit son nom.

On navigue à travers une vaste combe tapissée de rhododendrons, de gentianes et d’orchidées. Situé au Sud de la Font Blanca, le pic Besali occupe désormais le fond d’écran.

On atteint la base d’un large couloir de rocaille et de gispet qui mène au portella (2.510 m). Une dernière rampe qui serpente entre un névé résiduel et un champ d’éboulis nous mène au col qui sépare le pic Besali (2.637 m) de notre cible, masquée par les aspérités de la puissante dorsale méridionale.

Une trace vaguement cairnée court sur le flanc occidental de la crête et permet d’en éviter les difficultés .

Outre la vue plongeante sur la sauvage vallée de Rialb, la Font Blanca offre un incomparable panorama du fait de sa position privilégiée sur la chaine axiale : étang de Gnioure et vallée de Siguer 2.000 m plus bas, Serrera, Estanyó, les Fangasses, Tristaina et Aspre, Médécourbe, Coma Pedrosa, Estats, Thoumasset, etc. Autant de pics, de massifs, de lacs dont on ignorait jusqu’au nom il y a cent cinquante ans. « Les cartes [de la région d’Aran, d’Andorre et des Encantats] n’existaient pas à l’époque, rappelle Louis Audoubert, même le comte Russell se perdait où se trompait régulièrement de pic. En plein désarroi devant l’anarchie géologique de ces sierras perdues et l’imbroglio des cirques orientés en tous sens, il avait pourtant entrevu les explorations et les traversées que mèneront à bien Gourdon, Lequeutre, Schrader et Brulle. »

Historique

Dominée d’une cinquantaine de mètres par la Coma Pedrosa, la Font Blanca n’est pas la cime la plus élevée d’Andorre mais c'est à coup sûr la plus élancée, la plus aisément reconnaissable de part et d’autre de la frontière. Versant andorran, on appelle cette pyramide longtemps enneigée Font Blanca, du nom d’une source qui jaillit de son flanc Nord-Est ; versant ariégeois, on la désigne à tort du nom de pic du Port de Siguer, qui se trouve plus à l’Est (pic de Banyell). Henry Russell, qui en fit la première ascension, lui donna le nom de Rialp, déformation du nom du riu à qui il donne naissance : le Rialb.
Nous sommes en fin d’été 1864. Après une fructueuse campagne dans les Pyrénées orientales (Carlit, Puigmal, Canigou pour l’un ; herborisation pour l’autre), Russell et son ami Packe passent en Andorre par le port de Soldeu, atterrissent épuisés à Ordino, trouvent asile dans une pauvre auberge. L’estomac incommodé par la cuisine espagnole, ils remontent vers El Serrat, résolus à franchir la frontière et à regagner Foix dans les plus brefs délais. Surpris par la nuit au port de Siguer (2.395 m), ils se résignent à bivouaquer sur place, l’un dans une misérable cabane, l’autre dans son sac de peau. Le lendemain, en dépit d’une nuit blanche, nos deux compères remontent le val de Rialp et découvrant un amphithéâtre des plus sauvages, ne résistent pas à la tentation d’en ascensionner l’élégante éminence. Calcinés par le soleil, ivres de fatigue, ils redescendent d’une traite à Tarascon, où ils peuvent enfin se sustenter d’autre chose que de « la chèvre qui rappelle le caoutchouc ».

Cette ascension coup de foudre de la Font Blanca est la première prise opérée en territoire andorran par un pyrénéiste, le plus célèbre d’entre eux en l’occurrence. Jusqu’aux campagnes d’exploration entreprises par Alphonse Lequeutre (1876), Maurice Gourdon (1878-1883), Roger de Monts (1878), Franz Schrader (1880), Aymar de Saint-Saud (1887), Henri Brulle et Jean Bazillac (1882), la lointaine et mystérieuse Andorre comptait parmi les terras incognitas des Pyrénées, au même titre que les monts d’Aran, les Encantats, la Haute Catalogne, la sierra de Guara et autres picos d’Europa.