Les peñas d'Ichusi

Accès routier  : De Cambo-les-Bains, suivre sur 20 km la D 918 qui mène à Sain-Jean-Pied-de-Port et tourner à droite direction Bidarray. Franchir la Nive sur le pont Noblia puis, presque aussitôt, emprunter à droite le pont qui enjambe son affluent espagnol le Baztan (ou Bastan), passer devant un gîte rural et enfiler la route étroite et sinueuse qui, après un troisième pont –  celui d'Enfer, d'où le Diable, désespérant d'apprendre le basque, se serait précipité –, monte en forêt jusqu'à la ferme Arouchia (ou Arruxia), terminus de la route. Garer le véhicule sur le bas-côté. Départ à 165 m.

Dénivelée  : 600 m.

Horaire  : 3 à 4 h A & R.

Difficulté  : Autrefois connue des seuls initiés, la boucle des peñas d'Ichusi est devenue un must de la randonnée au pays Basque et attire aux beaux jours de nouveaux adeptes désireux d’observer les colonies de vautours qui nichent dans les anfractuosités des peñas. Au nombre de trois, elles sont situées à l’extrémité d'un plateau de pâturages qui domine de 400 m les vallées d'Urrizate et d'Aritzacun. L'itinéraire ne présente aucune difficulté sérieuse mais le sentier en corniche est équipé de chaînes sur plusieurs tronons (vigilance donc), et, au retour, la descente du col d'Espalza (ou Ezpaltza) par le le GR10 et le ravin de Zelhaïburu peut impressionner les néophytes. Prévoir coupe-vent en toute saison. Provision d'eau en période estivale.

Cartographie  : Carte IGN 1345 OT. Cambo-les-Bains.

Bibliographie : Jean Dabos et Louis Audoubert : 50 balades et randonnées au Pays Basque (Éditions Milan, 1993). Miguel Angulo : 53 randonnées en moyenne montagne Pyrénées Basques (Rando Éditions, 1992). Yves Paccalet : Vautours au-dessus des Peñas (Terre Sauvage N°163 2001) Didier Castagnet : 100 sommets des Pyrénées (Rando Éditions, 2007).

Une centaine de mètres en aval de la ferme Arouchia, un poteau balisé GR 10 nous guide vers un  chemin empierré bordé de murets qui grimpe sec vers les murailles.

Cette brève mise en jambes nous amène en dix minutes à la grotte d'Harpéko Saïndoa (le saint qui sue), accessible par un escalier rudimentaire équipé d'une corde de chanvre (400 m).

Au fond de la cavité enténébrée (dont l'entrée n'est pas sans évoquer une vulve), un filet d'eau suinte sur une énorme stalagmite vitreuse enchâssée dans la roche – scène qui n'est pas sans évoquer un rapport sexuel entre des créatures élémentaires. Divers ex-voto sont posées au sol et sur les bas-côtés : un verre de lait, une bougie allumée, des lambeaux de tissu, un préservatir neuf, une vieille montre, un fanion scout, etc. Atmosphère. Ce lieu de pèlerinage païen serait vieux de 3.000 ans. Au dire des ethnologues, s'enduire de la sueur du saint passait pour guérir de l'impuissance ou des maladies de peau.

 

Cette visite effectuée, on repart sur le GR qui se faufile au sein une végétation plus clairsemée en longeant le bord des falaises. Sur notre gauche, l'Arcasuri et l'Irubelakaskoa, qui vont nous tenir compagnie un certain temps.

Le chemin en balcon, tortueux et aérien, file plein Sud, aborde des zones d'éboulis et des rampes rocailleuses avant d'atteindre le fond du vallon.

On tourne le dos aux bergeries de Bernatenéa et Antsutanéa et à la haute vallée du Baztan. Dernier bastion du chaînon de Gorramendi, la fière pyramide de l'Irubelakaskoa (970 m) veille sur ce site sauvage, d'un côté la vallée d'Urrizate, de l'autre celle d'Aritzacun.

Bifurcation à 545 m : on abandonne le GR10 qui grimpe à droite vers le col d'Espalza (par lequel on redescendra), pour traverser un ruisseau et bifurquer au Sud en direction du promontoire de Marticotenea.

Un large sentier contournant le Bagamendi s'élève entre de suaves tapis de fougères. Une belle couleuvre d'un vert mentholé le traverse sous nos yeux pour se couler en douce dans la verdure.

Promontoire de Marticotenea (ou Martikoenea, 610 m, 1h). Une famille de pottocks, dont le poulain ne doit pas avoir trois mois, se régale du gazon frais qui tapisse le sol sous un arbre mort. Mascottes de la région, ils sont les descendants des petits chevaux qui peuplaient le Sud-Ouest de l'Europe il y a environ un million d'années. Été comme hiver, ils vivent en montagne en semi-liberté et ne se montrent guère farouches.

De ce belvédère, on surplombe le vallon de Marticotenea de plus de 300 m. Les parois de grès, rongées par les éléments, sont truffées d'anfractuosités et de corniches où de nombreux couples de vautours fauves ont élu domicile. Ils sont chez eux dans cette région forestière, mais difficile de les approcher à moins de 100 m sans déployer des ruses de sioux. Il s'agit de l'une des plus importantes colonies d'Europe. Moment idéal pour sortir ses jumelles. Les ailes déployées, les rapaces tournoient au-dessus des précipices, se laissent porter par les courants thermiques et veillent jalousement sur leur aire de chasse. Les gros lézards verts qui profitent du soleil pour se dorer la pilule sur les pierres plates figurent en bonne place sur leur écran radar.

On quitte à regret ce poste d'observation pour reprendre le sentier qui, après une selle herbeuse à droite d'un éperon rocheux, continue vers l’Ouest en épousant le relief tourmenté des falaises. Des chèvres, revenues à l'état sauvage, nous toisent de haut : à l’évidence, nous ne sommes pas en mesure de leur disputer leur pitance sur ces rochers escarpés. Corbeaux, milans royaux, martinets et autres hirondelles n'ont pas manqué de coloniser des lieux aussi giboyeux et sillonnent l'azur en gobant des insectes en vol.

Le circuit, vertigineux par endroits, se poursuit à flanc versant espagnol et atteint rapidement la seconde peña. Prudence, elle donne sur un à-pic de plus de 400 m. Une descente à travers un immense champ de fougères nous amène au pied de la troisième peña, d'où on bénéficie d'une vue saisissante sur ce bastion prisé des vautours.  Vue plongeante sur les barrancos espagnols, tapissés de pelouses herbeuses, de tapis de fougères et de pins à crochets.

On passe au-dessus de la regata (cascade) d'Ichusi puis près de la source de Sistagorri, cette dernière alimente une nappe d''eau fraîche qui s'étale au milieu d'un oasis de verdure. Bien difficile de résister à la tentation d'y tremper les pieds en cette période caniculaire.

Une halte s'impose plus loin au cayolar de Lartezarreko Borda (622 m), d'où l'on peut jouir d'un superbe point de vue sur les falaises aux vautours, et au-delà sur l'Irubelakaskoa, le Monte Ococa et les crêtes de Gorramakil.

Le relief s’aplanit, on progresse dans une zone vallonnée que se disputent fougères, genêts, chardons bleus et bruyères. La selle herbeuse de Méhatché (ou Meatze ou Mehaxia) est désormais parfaitement visible au Nord, à la base de l'Artzamendi, reconnaissable à ses antennes et au radome blanc (dome radar sphérique) défigurant sa cime.

On y parvient sans encombre au col de Méhatché (756 m), où on rejoint le GR10 venu du col des Veaux. Les pottocks ont pris possession des lieux et musardent au milieu d'une dizaine de voitures en stationnement. Les plus jeunes ne quittent pas leur mère d'un sabot ; se rouler dans l'herbe semble les combler d'aise. Les vaches semi-sauvages appelées betizu ou betisoak ruminent allongées au soleil et agitent nonchalamment la queue pour chasser les mouches. A l'évidence, leur bonheur se trouve sur la montagne basque.

Le col de Méhatché est situé idéalement entre le pic d'Iguzki (845 m) au Sud-Ouest et l'Artzamendi (926 m) au Nord-Est, qui nous domine de toute sa masse et dont on ne voit pas d'ici les émetteurs hertziens et le radome qui sert de station radar à l'aviation civile. On peut faire la rapide ascension de ces deux sommets. De cet endroit, point le plus élevé du parcours, le tour d'horizon se révèle rien moins que somptueux : Gabizos, Anie, Trois Rois & Ansabère, Behorleguy, Orhy, Hautza, Crêtes d'Iparla, Irubelakaskoa, peñas de Haya, Rhune, sans parler des peñas d'Ichusi, auxquelles le GR 10 nous invite à tourner le dos.

Il nous oriente à l'Est en suivant la frontière, passe auprès des bornes N°81 & 82, serpente à travers les plateaux de Zarkambidé et d'Artzategikoa Lepoa vers le col d'Artzatey (666 m).

 

On atteint rapidement le col de l'Espalza (676 m), où on entame une descende très raide dans le ravin de Zelhaïburu le long d'une sente rocailleuse au possible.

A son terme de cette descente, on récupère le chemin de l'aller qui nous entraîne vers le fond du vallon du Bastan, la grotte d'Harpékosaïndoa et la ferme Arouchia.