Ascension de la Punta de la Madalena (2.275 m)

Accès routier  : De Canfranc, descendre par la N 330 vers Jaca. 5 km après Villanua, prendre à droite la route de Borau et d'Aisa. Remonter la vallée au Nord sur une sinueuse route de montagne jusqu'à son terminus. Départ à 1.480 m.

Dénivelée  : 800 m.

Horaire : 3 à 4 h A & R.

Difficulté : Ascension sans difficulté notable dans l'un des plus beaux cadres des Pyrénées occidentales : les sierras del Bozo, de la Garganta, d'Aspe, de Borau et de la Magdalena. Cette dernière prend naissance au col du même nom et s'étire jusqu'à la Majada de la Anaza, au pied de la Punta de Las Blancas. Sa longue crête sépare les hautes vallées de Aisa et de Canfranc, qu'elle surplombe de plus de 1.000 m.

Cartographie : Carte N°2 au 1 : 40.000 des Editions Pirineo nantie d'un livret explicatif Valle del Aragón (Collarada, Aspe, Anayet, Bisaurin).

Bibliographie : Édouard Wallon : Explorations nouvelles dans les montagnes du Haut-Aragon (Annuaire du C.A.F.). George Cadier : Le pic d’Aspe (Club Alpin Français, 1903).

Passer la barrière métallique, suivre la piste cimentée qui grimpe sec au Nord-Est et atteint rapidement les estives.

Face à nous, un paysage de carte postale avec, de gauche à droite, Peña de Mediodia, Rueba Bernera, Pico Olibon, Llena del Bozo, Llena de la Garganta, Aspe. Rien n’y manque : ni les bosquets de pins, ni les pelouses parsemées de touffes de rhododendrons, d’églantines, d’iris, de renoncules et de gentianes ni les ruisseaux d’eau vive avec cascades aux ruptures de niveau, ni les crêtes laminées par l’érosion caractéristiques des régions calcaires, ni les couloirs d’éboulis, ni les champs de neige baignés par la luminosité ambrée des hautes altitudes. Et, au lever du jour, il n’est pas rare qu’une harde d’isards assure la visite guidée des lieux.

Laisser à gauche le refuge non gardé de Saleras ou de Boyeros (1.560 m) construit au flanc de la sierra d’Estiba ; elle s’étire du pico Mesola au cuello del Bozo, qui donne accès au val de Aragüés et au refuge de Lizara, base d’ascension du Bisaurin. Descendre vers le ruisseau de Igüer que l’on traverse à gué et prendre pied sur la crête herbeuse qui donne accès aux pâturages de Peñarruaba.

On distingue parfaitement à l'Est, entre la Punta Rigüelo et la Punta Madalena, le collado de la Magdalena  auquel on doit accéder. Sur certaines cartes, le collado de la Magdalena figure sous le nom  de Rigüelo, de Lecherin ou encore del Torbillón… Rien de nouveau sous le soleil, en 1866 le comte Henry Russell déplorait déjà les approximations de la toponymie locale : « C'est un malheur commun à presque toutes les montagnes d’Aragon, d’avoir deux ou trois noms, comme les filous. Nos descendants seront bien déroutés, quand ils chercheront à classifier tous ces pics espagnols, qui ont autant de noms que d’arêtes ou d’aspects. » Aussi ne s'étonnera-t-on pas de savoir que la sierra porte le nom de Magdalena, et la punta celui de Madalena.

Suivre la branche droite du SL-HU 105 "Ruta del puerto de Aisa" balisé vert et blanc qui monte au Nord, dépasser un panneau indiquant la Surgencia al Chorrotal puis, cinquante mètres plus loin (1.600 m), bifurquer à droite pour prendre un sentier à peine mentionné sur les cartes mais bien tracé qui s’enfonce dans le vallon de Rigüelo. Il file rive droite de la rivière que l'on domine d'une vingtaine de mètres.

On progresse pratiquement de plain-pied jusqu’à la plana de Rigüelo où, au niveau d'un énorme bloc erratique (1.705 m), on récupère le GR 11 venu du cuello del Bozo. Dès lors, ne reste qu'à suivre le balisage rouge et blanc… et non le sentier qui, à l'embranchement suivant, mène au Paso de la Garganta de Aisa.

En toile de fond, la Punta Lecherin (ou Garganta del Borau), les Mallos de Lecherines et la Punta Rigüelo, qui bornent au Sud une région surnommée les Dolomites aragonaises par nos amis espagnols. Selon les géologues, le massif transfrontalier d'Aspe se trouve dans le prolongement de la nappe dite de Gavarnie qui déploie ses calcaires crétacés jusqu’au pic d’Anie et à la sierra d’Alano. Depuis 10.000 ans, les agents atmosphériques, les glissements de terrain, les écroulements ont dépouillé la roche de son manteau, mettant à nu un capharnaüm minéral hérissé de chicots lézardés, de lames distordues, de falaises et de pointes abruptes dont l’altitude devait à l’origine avoisiner 6.000 m.

Monté au Bisaurin en 1875 par le lac d’Estaens avec un chasseur d’Urdos, Russell concéda que ce massif méritait d’être exploré dans ses moindres recoins tant il recelait de singulières perspectives : « La forme des montagnes est étrange, surtout du pic d’Aspe au Bernère (Pico d’Olibón), et nul ne devinerait que ce sont là les Pyrénées ; on y rêve d’Atlas et de l'Abyssinie, malgré les flaques de neige qui brillent éternellement à leur front. » Ce fut ce un autre membre de la Pléiade pyrénéiste, Édouard Wallon, qui, de 1878 à 1881, écuma cette  région encore sauvage afin de réaliser une Carte de la Navarre à la vallée d'Aure – la première.

Traverser le rio, laisser en amont la source du Rigüelo, et partir vers le Nord-Est avant de s'orienter franchement au Sud-Est. On surplombe le Cubilar de Rigüelo (1.815 m) puis, après avoir contourné une arête rocheuse, on rejoint la base du Canal de Rigüelo que l'on va remonter en intégralité.

Après une série d'écharpes, le GR grimpe en balcon rive gauche du Canal à travers des pelouses bronzées par le soleil où s’accrochent de rares sapins.

En vue du col, on progresse sur une litière de débris sédimentaires à l’aplomb  du barranco, des troncs d'arbres viennent opportunément consolider le sentier.

Collado de la Magdalena (2.043 m), terminus d'une piste venue de Pondarron (entre Aratorés et Borau).

Abandonner le GR qui descend vers Canfranc Pueblo et l'ancien refuge militaire Lopez Juici, base d'ascension de la Punta Lecherin. Tourner le dos aux Mallos et attaquer la pente plus revêche qu'il n'y parait.

On s'élève hors cairn et hors sentier en suivant peu ou prou une clôture de barbelés dont la raison d'être ne semble pas des plus évidentes.

Une demi-heure de grimpade nous amène aux abords de la cime, où les pelouses cèdent place à un terrain vaguement lapiazé.

Au Sud se dresse le culmen de la sierra, le Pico de la Madalena, plus élevé d'une dizaine de mètres et aisément atteignable, mais sa vue est plus bornée, sur le massif d'Aspe notamment, aussi le détour ne s'impose-t-il pas.

Sommet de la Punta (2.275 m) qui, malgré sa modeste altitude, se révèle être un belvédère de choix. Vue somptueuse au Nord-Ouest sur la Peña Forca, le Castillo d'Acher, le pico Agüerri et le Bisaurin ; au Nord, sur la Llena del Bozo, la Llena de la Garganta, le pic d'Aspe, la Punta Rigüelo et les Mallos de Lecherines.

Au Nord-Est, les têtes du Vertice, du Pico d'Anayet et de l'Ossau pointent au-dessus des murailles de la Peña Blanca. Par derrière, se profilent les silhouettes hardies du Lurien, du Palas, de l'Arriel, du Balaïtous et de l'Infernio.

À l'Est, le regard plonge jusqu'au fond du Canal de Ip, encadré par la Moleta, la Pala de Ip et la Collarada.