Nul ne sait qui le premier gravit le pic des Quatre Termes (anciennement Soum de Port-Bieilh), ainsi nommé car il sépare quatre domaines de dépaissances (pâturages de Barèges, Néouvielle, Campan et Bastan) réputés pour la qualité de leurs animaux de boucherie et leurs laitages. Au milieu du XIXe siècle, la contrée située au Sud-Est du Pic du Midi est réputée sauvage et quasiment inexplorée. Emilien Frossard, fils d’un des fondateurs de la Société Ramond, entreprit en 1872 de relier Gripp à Orédon par les lacs de Caderolles et la Hourquette de Bastan. Il approcha le pic mais ne s’y risqua pas. Russell, qui parcourut la région quelques années plus tard, la décrivit comme l’empire de la désolation, « un horrible champ de ruines. » En 1901, deux touristes de Barèges, Lacoste et Verdun, l’explorèrent en compagnie d’un pêcheur aussi bouleversé que l’environnement dans lequel ils évoluaient. « Rien de plus désolant, consignèrent-ils à leur retour, que ces régions granitiques où seuls les isards et les vautours peuvent trouver asile. Les monts et les crêtes déchirés, brisés, pulvérisés, s’écroulent et tombent en miettes. Ce ne sont qu’amoncellements de blocs, chaos, ruines gigantesques couvrant de leurs débris les bas-fonds et les flancs des montagnes. Lorsque, l’été, la neige disparaît complètement, que rien ne cache la navrante nudité de ces montagnes, le spectacle qu’elles nous offrent est d’une superbe sauvagerie. »
Les temps ont bien changé puisque la première remontée mécanique des Hautes Pyrénées fut construite en 1936 à Barèges (funiculaire du Lienz), déjà pourvue d’une école de ski depuis 1921. Aujourd'hui, la station de Barèges couplée avec La Mongie est la plus vaste étendue skiable des Pyrénées (100 kilomètres), on y comptabilise 69 pistes et 39 télésièges, dont l’un monte quasiment au pied du Contadé. Évolution d’autant plus stupéfiante qu’à l’origine le lieu-dit La Mongie n’était loti que d’un pauvre baraquement. Il est maintenant question d’une liaison routière entre la station et celle de Saint-Lary qui passerait par la délicieuse vallée d’Aygues-Cluses, où se portent les randonneurs soucieux d’une montagne préservée. « Il règne dans cette vallée, écrit Louis Audoubert, une telle harmonie entre minéral et végétal qu’elle semble être l’œuvre conjointe d’un paysagiste génial et d’un jardinier japonais. » À l’avenir, qui sait, les touristes – les yahous, comme les appelait Beraldi – déambuleront peut-être ici entre les piles de béton d’un échangeur équipé de caméras de vidéo-surveillance. À cette idée, on ne peut s’empêcher de penser à la parole de Zarathoustra : « La terre a une peau et cette peau a des maladies. L’une d’elles s’appelle « homme ».