Ascension de la Collarada par La Trapa (2.885 m)

Accès routier  : Province d’Aragon. Passer le col du Somport, dépasser Canfranc et descendre sur Villanua. S'arrêter à la Mairie/Office du tourisme (ouvert du mercredi au samedi) pour demander l'autorisation d'emprunter la piste (état médiocre) qui dessert le refuge Cubilar de l’Espata (1.650 m). En période estivale, la piste est barrée au niveau d'un abreuvoir à l'altitude 1.230 m, interdite à toute personne non autorisée, et seuls quelques chauffeurs de 4 x 4 sont habilités à emmener les randonneurs au refuge de la Trapa (A & R : 10€). Départ sur réservation à partir de 6 h à Villanua. Antonio Serrano Berni (caminosdecollarada@gmail.com).

Dénivelée  : 1.250 m depuis la Trapa (alt. 1.740 m).

Horaire  : 5 à 6 h A & R.

Difficulté  : Tant par Villanua que par Canfranc, l’ascension de la Collarada réclame une longue marche d’approche qui dissuade la plupart des touristes. Ajoutons à cela une dénivelée conséquente, un itinéraire partiellement hors sentier, la présence de rébarbatifs escarpements rocheux et on comprendra pourquoi seuls les randonneurs expérimentés s’aventurent sur cette grande et belle montagne calcaire. Possibilité d’étaler la randonnée sur deux jours en dormant au refuge de la Trapa ou en bivouaquant aux alentours. Prévoir de l'eau en quantité... et se méfier des orages en fin d'après-midi.

Cartographie  : Carte n°2 au 1 : 40.000 des Editions Pirineo nantie d'un livret explicatif (Collarada/Aspe/Anayet/Bisaurin) disponible dans la région.

Bibliographie : Henry Russell : Souvenirs d'un montagnard (Editions Pyrémonde, 2003). Henri Beraldi : Cent ans aux Pyrénées (Édition Monhélios, 2011). Alain Bourneton : Les grandes Pyrénées (Editions Glénat, 1995). Louis Audoubert : Les plus beaux sommets des Pyrénées (Editions Milan, 1995). Miguel Angulo : 1.000 ascensions dans les Pyrénées (tome I, d'Hendaye au Somport) (Editions Elkarlanean, 2002). Edouard Wallon : Nouvelle exploration dans les montagnes du Haut Aragon Brazato & Collarada (C.A.F., 1876).

Reconnaissable de loin à la calotte blanchâtre qui coiffe sa cime, la Collarada (collerette dorée) domine la plaine de Jaca de 2.000 mètres et l’ancien cirque glaciaire d’Yp et son embalse (27 ha) de plus de 700 m – site défiguré par un barrage et d’affligeants bâtiments de maintenance technique.

Contourner le refuge forestier de La Trapa, terminus de la piste, pour prendre un sentier qui se faufile en sous-bois vers le Nord-Est (panneau). Il traverse une clairière, se dirige vers une échancrure de la muraille calcaire qui barre l’horizon.

Escalader la cheminée (I. sup.), plus malcommode que difficile, et équipée d’une chaîne.

NB. On peut éviter cette difficulté en récupérant sur la gauche une sente (vestige du passage des moutons qui peuplaient autrefois les pâturages supérieurs) qui, après une boucle au Nord-Ouest, rejoint la voie normale en haut de l’escarpement. Repérer le passage pour le retour.

Après la traversée d’une zone karstique (1.850 m), on débouche dans les vastes pâturages de Los Cubilares, aujourd'hui désertés. On poursuit en suivant peu ou prou la ravine terreuse de la Ciresera. On laisse à droite la cabane de El Trapal (1.930 m) pour filer Nord-Est à travers les croupes herbeuses d’El Falcar parsemées d’iris et d’edelweiss.

Plus haut, on atteint une mare, le Llano de la Fuente (2.420 m) alimentée par une source provenant de la fonte des névés.

Sur notre gauche, le massif d'Aspe ne passe pas inaperçu. Au premier plan, la Peña Blanca, les picos de Tortiellas, le Lecherin et les Mallos.

On entre insensiblement dans un monde minénal où la végétation se limite aux mousses et aux lichens. La voie a été recairnée récemment, initiative d’autant plus bienvenue qu’on évolue dans un no man's land karstique délicat à négocier en cas de brouillard.

L'itinéraire est désormais évident, le crâne dénudé de la Collarada apparaît au Nord-Est. La pente se redresse et on progresse schuss sur un sol parsemé de gravats. La trace serpente dans cette steppe aride que le comte Russell comparait à « un désert incandescent et silencieux, qui monte d’une seule pente immense, presque infinie, jusqu’à la cime de la Collarada. »

Sur notre gauche, on distingue el Arca de los Campanalis (Arche des clochers) creusée dans la crête occidentale, une curiosité naturelle que l’on trouve aussi au Sestrales et à la sierra de Partacua. Pour y accéder, du Llano de la Fuente, s’orienter au Nord vers la brèche qui sépare la dorsale occidentale du piton de la Collarada. S’élever sur les gradins mi-herbeux mi-pierreux (D : + 200 m) jusqu’à la base de cette brèche puis sur une pente secondaire jusqu’à une petite plate-forme rocheuse située dans l’axe du portique (2.675 m), où s’encadre la majestueuse Collarada. Combien de temps survivra-t-elle à l’érosion, nul ne peut le dire. Des milliers d’années probablement. Même s’il est clair qu’elle a connu des jours meilleurs, en l’état elle soutient aisément la comparaison avec l’Arc de Triomphe. Compter deux heures A & R environ pour ce détour.

À 2.780 m, on atteint la base des murailles, entaillées de deux profondes ravines. Celle de gauche est la plus escarpée et réclame une courte escalade (II+) ; celle du centre, encadrée de pitons délabrés, est jonchée d’éboulis hyper croulants et présente des passages rocheux où il faut poser la main (I+). On peut aussi opter pour une voie dont l’orée se trouve légèrement sur la droite, prudence, elle comporte la traversée d’une dalle polie et dépolie pouvant poser problème en cas de pluie ou de givre. Quelle que soit la solution choisie, attention aux chutes de pierres !

La crête atteinte, ne reste qu’à remonter une allée en pente douce. Au sommet, une borne cisaillée à la base par la foudre. Comme quoi la nature a toujours le dernier mot… Il y a une dizaine d’années, on trouvait plantée dans le cairn culminal une superbe sculpture en inox représentant un skieur de fond, ornement qui changeait agréablement des bornes de ciment armé et des croix de fer. Il semble que les éléments en aient eu aussi raison… à moins qu’elle ne se soit envolée de son propre chef. De toute évidence, les sculptures qui trônaient au Pic des Trois Rois et au Txurrumurru sont signées du même sympathique auteur.

Si le panorama est à couper le souffle (Anayet, Ossau, Balaïtous, Palas, Sierra Partacua, Vignemale, etc.), le plus spectaculaire demeure la vue plongeante qu'on a sur le cirque d'Yp et son embalse aux eaux aigue-marine. « Rien dans les Pyrénées, écrivait Henry Russell, ne ressemble au cirque d'Yp. Moins gigantesque que celui de Troumouse, il est encore plus sombre et plus étrange. C'est une prison colossale, à peine s'ouvre-t-elle à l'Ouest par où l'eau du lac d'Yp s'échappe en bondissant jusqu'à Canfranc, entre d'énormes précipices. » I Le site est bien gardé, dans le sens horaire : Pala de Yp, Punta Escarra (ou Esquera), Pico de l’Aguila, Pala de Alcañiz (Bucuesa), Peña Nevara, Collaradeta et Collarada.